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LIVRE TROISIESME. ^9
homme,il me femble qu'il eft fuperflu de fe veftir curieufementen
fon priué : fa maifon, fon train, fa anime refpondcnt affez de luy. Le
confeilqu'Ifocrates donne à fon Roy,ne me femble fans raifomQu'il
foit fplendide en meubles tk vftenfiles : dautant que c'eft vne defpenfe
de durée,qui paffe iufques à fes fucceffeurs : Et qu'il fuye toutes magnificences,
qui s'efcoulent incontinent & de l'vlage tk de la mémoire.
I'ay mois à me parer quand i'eftoy cadet, à faute d'autre parure : &
mefeoitbien: Il en eft fur qui les belles robes pleurent. Nous auons Frugalité de nos
des contes merueilleux de la frugalité de nos Roys autour de leurs R
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perfonnes, tk en leurs dons: grands Roys en crédit, en valeur, & en
fortune. Demofthenes combat à outrance laloy de fa ville, qui affignoit
les deniers publics aux pompes des ieux,& de leurs feftes: Il
veut que leur Grandeur fe montre en quantité de vaiflèaux bien équipez,
tk bonnes armées bien fournies. Eta-lon raifon d'aceufer Theophraftus,
qui eftablit en fon Liure des richeffes, vn aduis contraire : tk
maintient telle nature de defpenfe, eftre le vray fruict de l'opulence.
Ce font plaifirs, dit Ariftote, qui ne touchent que la plus baffe commune:
qui s'efuanouïffcnt de la fouuenance auffi toft qu'on en eft
raffafié : tk defquels nul homme mdicieux tk graue ne peut faire eftime.
L'emploite me fembleroit bien plus royale, comme plusvtile,
iufte tk durable, en ports, en haures, fortifications tk murs : en baftimens
fomptueux,en Eglifes,hofpitaux,collèges, reformation de D^-nfes royaîet
rues tk chemins : en quoy le Pape Grégoire XIII. lairra fa mémoire lee plu» tufles &*
recommandable à long-temps: tk en quoy noftre Roy ne Catherine durables quelles.
tefmoigneroità longues années fa libéralité naturelle & munificence,
fi fes moyens fuffifoient à fon affection. La fortune m'a fait grand
defplaifir, d'interrompre la belle ftructure du Pont-neuf de noftre Pont, neuf de Paris.
grand'ville, tk m'ofter l'efpoir auant mourir d'en voir en train le feruice.
Outre ce, il femble aux fubjets fpectateurs de ces triomphes,
qu'on leur fait montre de leurs propres richeffes, tk qu'on les feftoy e
àléursdefpens. Car lespeuplcsprefument volontiers des Roys, comme
nous faifons de nos valets: qu'ils doiuent prendre foin de nous
apprefter en abondance tout ce qu'il nous faut, mais qu'ils n'y doiuent
aucunement toucher de leur part. Et pourtant l'Empereur Galba
ayant pris plaifir à vn muficienpendantfonfouper,fefit porter
fa bo'ëte, tk luy donna en fa main vne poignée d'efeus, qu'il y pefcha,
auec ces paroles: Ce n'eft pas du public, c'eft du mien. Tant y a, qu'il
aduient le plus fouuent,que le peuple a raifon: tk qu'on repaift fes
yeux, de ce dequoy il auoit à paiftre fon ventre. La libéralité mefme ziberalite'en main.
n'eft pas bien en fon luftre en main fouueraine : les priuez y ont plus fomerame, hors de
dedroict. Car à le prendre exactement, vn Roy n'a rien proprement M
fien ; il fe doit foy-mefme à autruy. La iunfdiction ne fe donne point
en faueur du iuridiciant: c'eft en faueurduiuridicié. Onfaitvnfuperieur,
non iamais pour fon profit, ains pour le profit de l'inférieur:
Et vn Médecin pour le malade, non pour foy. Toute magiftrature,
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