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LIVRE PREMIER. m
dance, qu'ils n'ont que faire d'agrandir leurs limites. Ils font encore
encét heureux poin&,de ne délirer qu'autant que leurs neceflitez
naturelles leur ordonnent: tout ce qui eft au delà, eft fuperflupour
eux. Ils s'entr'appellent généralement ceux de mefme âge,frcres : enfansjceux
qui font au denous> & les vieillards font pères à tous les autres.
Ceux-cy laiffent à leurs héritiers en commun, cette pleine poffeiîïon
de biens par indiuis, fans autre titre, que celuy tout pur que
nature donne à les créatures, les produifantau monde. Si leurs voifins
patient les montagnes pour les venir affaillir, & qu'ils emportent
la victoire fur eux, l'acqueft du victorieux,c'eft la gloire & l'auantage
d'eftre demeuré maiftre en valeur & en vertu : car autrement ils n'ont
que faire des biens des vaincus, & s'en retournent à leui s pais, où ils
n'ont faute d'aucune chofe neceffaire ; ny faute encore de cette grande
partie, de fçauoir heureufemeut rouir de leur condition, & s'en
contenter. Autant en font ceux-cy à leur tour. Ils ne demandent à
leurs prifonniers autre rançon, que la confeftion & recegnoiiTance
d'eftre vaincus : Mais il ne s'en trouue pas vn en tout vn liecle, qui
n'ay me mieux la mort,que de relafcher,ny par contenance, ny de parole
, vn feul poinct d'vne grandeur de courage inuincible. Il ne s'en
void aucun, qui n'ayme mieux eftre tué & mangé, que de requérir
feulement de ne l'eftre pas. Ils les traitent en toute liberté, afin que la
vie leur foit d'autant plus chère : 5C les entretiennent communément
des menaces deleur mort future,des tourmens qu'ils y auront à fouffrir,des
appreftsqu'ondreife pour cet effet,du deftranchementde
leurs membres, & du feftin qui fe fera à leurs defpens. Tout cela fe Mort menacée aux
fait pour cette feule fin, d'arracher de leur bouche quelque parole "y