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Subfiimlonsmafcu
i$4 ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
Ce font gens qui fe ioiient de leurs teftamens, comme de pommes ois
de verges, à gratifier ou chaftier chaque action de ceux qui y prétendent
intereft. C'eft chofe de trop longue fuite, tk de trop de poids,
pour eftre ainfi promenée à chaque inftant : tk en laquelle les fagcs fe
plantent vne fois pour toutes, regardans fur tout à la raifon tk obfer-
u a n c e
publique. Nous prenons vn peu trop à coeur ces fubftitutions
/;»«. mafculines: tk propofons vne éternité ridicule à nos noms. Nous
poifons auffi trop les vaines coniecl:uresdel'aduenir,que nous donnent
les efprits puérils. A l'aduenture eut-on fait iniuftice, de me
déplacer de mon rang, pour auoir efté le plus lourd tk plombé,le
plus long tk defgoufté en ma leçon, non feulement que tous mes frères,
mais que tous les enfans de maProuincc: foit leçon d'exercice
d'efprit, foit leçon d'exercice de corps. C'eft folie de faire des triages
extraordinaires, fur la foy de cesdiuinations,aufquelles nous fommes
fi fouuent trompez. Si on peut blcffer cette règle, tk corriger les
Le choix de nos deftinées aux choix qu'elles ont fait de nos héritiers, on le peut auec
héritiers, ne dépend plus d'apparence, en confideration de quelque remarquable tk enorde
nom pourquoy. m £ difformité corporelle: vice confiant inamandable : tk félon nous,
grands eftimateurs de la beauté, d'important preiudice. Le plaifant
Dialogue duLegiflateur de Platon, auec fes citoyens, fera honneur
à ce paffage. Comment donc, difent-ils, fentans leur fin prochaine,
ne pourrons-nous point difpofer de ce qui eft à nous, à qui il nous
plaira ? O Dieux,quelle cruauté ! Qif il ne nous foit loifible, félon que
lesnoftres nous auront feruy en nos maladies, en noftre vieilleffe, en
nos affaires, de leur donner plus tk moins félon nos fantafies ! A quoy
le Legiflateur refpond en cette manière : Mes amis,qui auez fans doute
bien-toft à mourir, il eft mal-aifé, tk que vous vous cognoifïiez, tk
que vous cognoiffiez cequieftàvous,fuiuant l'infcriptionDelphique.
Moy, qui fay les loix, tien, que ny vous neftcs à vous, nyn eft
à vous ce que vous iouïffez. Et vos biens tk vous, eftes à voftre famille
tant paffée que future : mais encore plus font au public, tk voftre famille
tk vos biens. Parquoy de peur que quelque flateur en voftre
vieillefTe ou en voftre maladie, ou quelque paffion vous follicite mal
à propos, de faire teftament iniuftc, ie vous en garderay. Mais ayant
refpecr. tk à Pintereft vniuerfel de la cité, tk à celuy de voftre maifon,
i'eftabiiray des loix, tk feray fentir, comme de raifon, que la commodité
particulière doit céder à la commune. Allez-vous-en ioyeufementoùlaneceffité
humaine vous appelle. C'eft à moy, qui ne regarde
pas vne chofe plus que l'autre, qui autant que ie puis, prends
foin du gêneraijd'auoirfoucy de cequevouslaiffez. Rcuenantàmon
propos, il me femble en toutes façons, qu'il naift rarement des femmes
à qui la maiftrife foit deuë fur des hommes, fauf la maternelle tk
naturelle: fi ce n'eft pour le chaftimentdeceux, qui par quelque humeur
fiebureufe,fe font volontairement foubmis à elles : mais cela
ne touche aucunement les vieilles, dequoy nous parlons icy. C'eft