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77* ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
L'inclination , vn mot fauorable d'vn grand, vn bon vifage, me rente.
Dieu fçait s'il en eft cherté en ce temps, de quel fens il porte. Toys
encore fans nder le front, les fubornemens qu'on me fait, pour me
tirer en place marchande: & m'en défends fi mollement,qu'il femble
que ie fouffriife plus volontiers d'en eftre vaincu. Or à vn efprit fi
indocile, il faut des baftonnades : ôc faut rebattre ôc refferrer, à bons
coups de mail ,cevaiffeauquifedefprend ,fedefcouft, quis'efchappe&defrobedefoy.
Secondement, que cet accident meferuoitd'exercitation,
pour me préparer à pis ; Si moy, qui ôc par le bénéfice de
la fortune, & par la condition de mes mœurs, efperois eftre des derniers,
venois à eftre des premiers attrappé de cette tempefte. M'inftruifant
de bonne heure à contraindre ma vie, ôc la renger pour vn
'Liberté l>raye, n o i m el eftat. La vrayeliberté, c'eft pouuoir toute chofe fur foy. Po-
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' tentifïimuseflqui fèbabetinpotellate.En vn temps ordinaire ôc tranquille.
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qm eft a u p o u u o n d e on le prépare a des accidens modérez oc communs:mais en cette conioy-moime.s«»««.
f ufion où nous fommes depuis trente ans,tou t homme François,foit
en particulier, foit à chaque heure,fur le poinct de l'entier renuerfement
de fa fortune. D'autant faut-il tenir fon courage fourny de
prouifions plus fortes &vigoureufes. Sçachons gréauiort, de nous
auoir fait viure en vn fiecle, non mol, languiffant, ny oy fif : Tel qui
laconfufwn des ne l'euft efté par autre moyen,fe rendra fameux par fon malheur.
Epts, retient & Comme ie ne lis guère éshiftoires, ces confuiions desautres Eftats,
agrée anosyeux. f ansregretdenelesauoir pu mieux confiderer prefent. Ainfi fait ma
curiofité, que ie m'aggrée aucunement de voir de mes yeux, ce notable
fpectacle de noftre mort publique, fes fymptomes-cV fa forme.
Etpuisqueienelafçaurois retarder, ie fuis content d'eftre deftinc à
yafïifter cVm'eninftruire. Si cherchons-nous euidemmentderecognoiftre
en ombre mefme, ôc en la fable desTheatres, la monftre des
ieux rragiques de l'humaine fortune. Ce n'eft pas fans compaftion de
ce que nous oyons:mais nous nous plaifons d'efuciller noftre defplai-
(ir par la rareté de ces pitoyables euenemens. Rien ne chatouille, qui
ne pince. Et les bons Hiftoriens fuy eut comme vne eaue dormante,
Ôc mer-morte, des narrations calmes, pour regaigner les feditions,
les guerres où ils fçauent que nous les appelions. le doute fi ie puis affez
honneftement aduoùer à combien vil prix du repos ôc tranquillité
de ma vie, iel'ay plus de moitié paffée en la ruine de mon pays. le
me donne vn peu trop bon marché de patience, és accidens qui ne
me faifilfentau propre : & pour me plaindre moy, regarde non tant
ce qu'on m'ofte,'que ce qui me refte de fauue, ôc dedans de dehors.
Il y a de la confolation, à efcheuer tantoft l'vn tantoft l'autre des
maux qui nous guignent de fuitte, cVaffenent ailleurs, autour de
nous. Aufti qu'en matière d'interefts publics, à mefure que mon af-
N o u s v e f f c n t o n s a m a n t fection eft plus vniuerfellement efpanduc , elle en eft plus foible.
poi^'a^'tiôs'^'ffaires Ioftit qu'il eft vray à demy, Tantum ex publias malis fentimus, quantum
particulière».' ad priuatasres pertinet. Et que la fanté d'où nous partifmes eftoit telle,