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I
ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
fuadc, qu'il ne fe puiffe croire au contraire : Et plus fafcheufe encore,
qu'on fe perfuade d'vn tel efprit, qu'il préfère ie ne fçay quelle difparité
de fortune prefente, aux efperances ôc menaces de la vie éternelle
! Ils m'en peuuent croire : Si rien euft deu tenter ma ieuneffe,
l'ambition du hazard & de la difficulté, qui.fuiuoient cette récente
entreprinfe, y euft eu bonne part. Ce n'eft pas fans grande raifon, ce
me femble, que f Eglife défend l'vfage promifeuè*, téméraire ôc in-
Pfeaumes de Va- ^iferet des fainftes ôc diuines chanfons, que le Saind Efprit a dictées
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qui fe dçiuent ma- D aul l l n c r a u t
d- métier Dieu en nos actions, qu auecque reuerennier.
ce ôc attention pleine d'honneur & de refpect. Cette voix eft trop
diuine,pour n'auoir autre vfage que d'exercer les poulmons,& plaire
à nos oreilles. C'eft delà confeiencequ'elle doit eftre produite,&
non pas de la langue. Ce n'eft pas raifon qu'on permette qu'vn garçon
de boutique parmy fes vains ôc friuolcs penfemens, s'en entretienne
ôc s'en iou'ë. Ny n'eft certes raifondevoirtracaffer parvnefa-
^/W^f/dJie/*- le, & par vne cuifine, le fainct Liure des facrez myfteres de noftre
gion cbrefhennejte créance. C'eftoient autrefois myfteres, ce font à prefent defduits ôc
jedotuet laifferpro c^ a t s > QC n'efl. pas c n paffanc & tumultuairement, qu'il faut manier
phaner en la bouche n ^ r r • « 11 „ , . n ~J. 1 n- / „
du populaire.
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» ierieux ôc vénérable. Ce doit eitre vne action deltinee, ôc
raffife, à laquelle on doit toufiours adioufter cette préface de noftre
office yfurfum corda, ôc y apporter le corps mefmedifpofé en contenance,
qui tefmoigne vne particulière attention ôc reuerence. Ce
n'eft pas l'eftude de tout le monde : c'eft l'eftude des perfonnes qui y
font vouées, que Dieu y appelle : Les mefehans, les ignorans s'y empirent.
Ce n'eft pas vne Hiftoire à conter: c'eft vne Hiftoire à reuerer,
craindre & adorer. Plaifantes gens, qui pcnfentl'auoir rendue maniable
au peuple, pour l'auoir mife en langage populaire. Ne tientil
qu'aux mots, qu'ils n'entendent tout ce qu'ils trouuent par efcrit ?
Diray-ie plus? Pour l'en approcher de ce peu, ils l'en reculent. L'ignorance
pure, Ôc remife toute en autruy, eftoit bien plus falutaire ôc
plus fçauante,que n'eft cette feience verbale ôc vaine,nourrice de
prefomption ôc de témérité. le croy auffi que la liberté à chacun de
diffiper vne parole fi religieufe ôc fi importante, à tant de fortes d'idiomes,
a beaucoup plus de danger que d'vtilité. Les Iuifs, les Mahometansj&quafi
tous autres, ont efpoufé&reuerentle langage, auquel
originellement leurs myfteres auoient efté conceus, Ôc en eft défendue
l'altération ôc changement, non fans apparence. Sçauonsnous
bien qu'en Bafque, ôc enBretaigne, il y ay t des luges affez, pour
eftablir cette traduction faite en leur langue ?1'Eglife vniuerfelle n'a
point de iugement plus ardu à faire,& plus folemne : En prefehant ôc
parlant, l'interprétation eft vague, libre, muable,& d'vne parcelle:
ainfi ce n'eft pas de mefme. L'vn de nos Hiftoriens Grecs aceufe iuftement
fon fiecle ; de ce que les fecrets de la Religion Chreftienne,
eftoient cfpandus emmy la place, és mains des moindres artifans : que
chacun en pouuoitdcbatre&: dire félon fonfens. Et que ce nous deuoit