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JIO ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
de refte, de ceux qui en auoient efté intereiTez, tk aufquels deuoît
Veno-eance, quand toucher le plaifir de cette pénitence: Tout ainfi eft à plaindre la venejï
à plaindre. geance , quand celuy vers lequel elle s'employ e, perd le moyen de la
fouffrir.Car comme le vengeur y veut voir clair,pour en tirer du plaifir,
il faut que celuy fur lequel il fe venge, y voy éclair auffi, pour en
receuoirdudefplai(ir,cx:de la repcntancc. Il s'en repentira, difonsnous.
Et pour luy auoir donné d'vne piftoladeen la tefte, eftimonsnous
qu'il s'en repente ? Au rebours, fi nous nous en prenons garde,
nous trouuerons qu'il nous fait la moue en tombant : Il ne nous en
fçait pas feulement mauuais gré, c'eft bien loin de s'en repentir. Et
luy preftons le plus fauorable de tous les offices de la vie, qui eft de le
faire mourir promptement & infenfiblcment. Nous fommes à conniller,
à trotter, tk à fuir les officiers de la Iuftice, qui nous fuiuent : tk
Le tuer eft plus luyeften repos. Le tuer, eft bon poureuiter l'offence à venir, non
atlion de crainte, pour venger celle qui eft faite. C'eft vne action plus de crainte, que
r a u e rj c. J c précaution, que de courage : de defenfe, que d'entre-
ijueie bramne. £ c k
prinfe. Il eft apparent que nous quittons parla, &lavrayefin de la
vengeance, & le foin de noftre réputation: Nous craignons, s'il demeure
envie, qu'il nous recharge d'vne pareille. Ce n'eft pas contre
Bueh communs au luy, c'eft pour toy, que tu t'en deffais. Au Royaume de Narfinguc
Royaume ie Nar- cet expédient nous demeureroit inutile : Là, non feulement les gens
fagot- de guerre, mais auffi les artifans, demeflent leurs querelles à coups
Inufcliues de Pollio n
d'efpée. Le Roy nc refufe point le camp à qui fe veut battre: & alfifte,
quand ce font perfonnes de qualité : eftrenant le victorieux d'vne
chaifne d'or: mais pour laquelle conquérir,le premier,à qui il en
prend enuie, peut venir aux armes auec celuy qui la porte. Et pour
s'eftre desfait d'vn combat, il en a plufieurs fur les bras. Si nous pendons
par vertu eftre toufiours maiftres de noftre ennemy, &le gourmanderà
noftre poftc,nous ferions bien marris qu'il nous efchappaft,
comme il fait en mourant. Nous voulons vaincre plus feurement
qu'honorablement. Et cherchons plus la fin, que la gloire, en
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querelle. Afinius Pollio, pour vn honnefte homme moinsex-
contre Planchât, cufable, reprefcntavne erreur pareille: qui ayant eferit desinuectiucs
contre Plancus, attendoit qu'il fuft mort, pour les publier. C'eftoit
faire la figue à vn aueugle,&diredespouïllesàvnfourd,&offenfer
vn homme fans fentiment, pluftoft que d'encourir lehazard
de fon reifentiment. Auffi difoit-on pour luy i que ce n'eftoit qu'aux
Lutins de luitter les morts. Celuy qui attend à voir trcfpafferl'Autheur,
duquel il veut combattre les Efcrits, que dit-il, linon qu'il eft
foiblc tk noifif ? On difoit à Ariftote, que quelqu'vn auoit mefdit de,,
luy: Qu'il face plus (dit-il) qu'il me foiiette,pourueuqueicn'y foy
Vcfmentirs reudn- pas." Nos pères fe contentoient de reuenchcrvneiniure parvndefàtc^jarcoups.
menty, vn defmenty par vn coup, Se ainfi par ordre: Ils eftoient affez
valeureux pour ne craindre pas leur aduerfaire,viuant,& outragé:
Nous tremblons de frayeur, tant que nous le voyons en pieds. Et