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5*4 ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
auffi fait mon opinion. Voila pas vne bien expreffe expérience, & Il
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bienaduantageufc? le ne fçay s'ils m'en trouueront trois en leurs regiftres,
nais,nourris, tk trefpaifez en mefme fouyer, mefme toid, W
ayans autant vëfcu par leur conduite. Il faut qu'ils m'aduoiienten ^
cela, que fi ce n'eft la raifon, au moins que la fortune eft de mon par- r 1
ty : or chez les Médecins, fortune vaut bien mieux que la raifon: ....
Qinls ne me prennent point à cette heure à leur aduantage, qu'ils ne » (I
me menacent point, atterré comme ie fuis: ce feroit fupercherie.
Auffi à dire la vérité, i'ay affez gaigné fur eux par mes exemples do- F a
meftiques,encore qu'ils s'arreftent là. Les chofes humaines n'ont |" c
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pas tant de confiance : il y a deux cens ans, il ne s'en faut que dix- #
hui£t, que cet effay nous dure : car le premier nafquit l'an inil quatre
cens deux. C'eft vrayementbien raifon,que cette expérience com- f m
menceà nous faillir: Qiuls ne me reprochent point les maux, qui ^
me tiennent afteurc à la gorge: d'auoir vefeu fain quarante-fept ans Pf' ec
pour ma part, n*eft-ce pas affez? Quand ce fera le bout de ma carrie- $f
MÉDECINE À CON- re, elle eft des plus longues. Mes anceftres auoient la médecine à con-
TRE-CŒUR AUX ANCE* tre-cœur,par quelque inclination occulte & naturelle : car la veu
JH-ES de MONTAI- mcÇmc des drogues faifoit horreur à mon pere. Le feigneur de Ga- pg
& ne
' uiac mon oncle paternel, homme d'Eglife, maladif dés fa naiffance, ici
&quifit toutefois durer cette vie débile, iufques à foixante-fept ans, |,IÏ|
eftant tombe autrefois en vne groffecV: véhémente fiéure continue, son
il fut ordonné par les Médecins, qu'on luy declareroit,s'ilnefevoii- tau
loit aider (ils appellent fecours ce qui le plus fouuent eft empefche- y
ment ) qu'il eftoit infailliblement mort. Ce bon-homme,tout effrayé fes
comme il fut de cette horrible fentenec, Si, refpondit-il, ie fuis donG j^'
mort : mais Dieu rendit tantoft après vain ce prognoftique. Leder- ^
nier des frères, ils eftoient quatre, Sieur de Buffaguet,& de bien loin ^
le dernier ,fe foubmit feula cet art: pour le commerce, ce croy-ie, \^
qu'il auoit auec les autres arts: car il eftoit Confeilleren la Cour dç
Parlement: tk luy fucceda fi mal, qu'eftant par apparence de plus for- y
te complexion,il mourut pourtant long-temps auant les autres, fauf L
vn,le Sieur de Saincl: Michel, Il eft poffible que i'ay ereceu d'eux cet- ^
te dyfpathie naturelle à la Médecine: mais s'il n'y euft eu que cette y
CONDITIONS NÉES EN confideration,i*euffe effay é de la forcer. Car toutes ces conditions
^taeujes. NOUS FANS RAIFON, ^ naiffent en nous fans raifon, elles font vicieufes : c'eft vne efpec
^ m ai a c[i c q u'j| £ a u t c o mb a ttre : Il peut eftre, que i'y a
peniion: mais ie 1 ay appuyée tk rortinee par les difeours, qui m en ^
ont eftably l'opinion que i'en ay. Car ie hay auffi cette confideration
de refufer la médecine pour l'aigreur de fon gouft : Ce ne feroit aifé- |
ment mon humeur, qui trouue la fanté digne d'eftre rachetée, par ^
tous les cautères tk incifions les plus pénibles qui fe facent. Et fui- ]| lr
uant Epicurus, les voluptez me femblent à éuiter, fi elles tirent à leur | eu
fuitte des douleurs plus grandes : Et les douleurs à rechercher, qui ^
tirent à leur fuitte des voluptez plus grandes. C'eft vne precieufe » tr
chofe, 111