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35>4 ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
que pour l'exercice de la Logique. On n'y débat rien pour le mettre^
en doute, mais pour défendre l'Autheur de l'efcole des obiedions «
quel n n elt pas pe
mis de's'enquerir. 11 eft bien aifé fur des fondemens auoiiez, de baftir '
ce qu'on veut ; car félon la loy & ordonnance de ce commencement, ^
le refte des pièces du baftiment fe conduit aifément, fans fe démen- d
tir. Par cette voy e nous trouuons noftre raifon bien fondée, & dif- ^
courons à boule-veuë : Car nos maiftres préoccupent & gaignent à
auant-main, autant de lieu en noftre créance, qu'il leur en faut pout f
conciurrc après ce qu'ils veulent;à la mode des Geometriens par leurs ^
demandes auoiiées :1e confentement & approbation que nous leur H
preftons, leur donnant dequoy nous trainer à gauche& àdextre, & $
nous pirouetter à leur volonté. Quiconque eft creu de fes prefuppo- fil'
fitions,il eft noftre maiftre & noftre Dieu : il prendra le plan des fes il
fondemens li ample tk li aifé, que par iceux il nous pourra monter,s'il \n
veut, iufques aux nues. En cette pratique & négociation de Science, y
Les experts doiuent nous auons pris pour argent contcntle mot de Pythagoras, que cha- ||
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eftrangeres: fon authorité c'eft le but, au delà duquel il n'eft pas per-! tJ
eftre creus, chacm que expert doit eftre creu en fon art. Le Dialecticien fe rapporte au (1'
enleuran. Grammairien de la lignification des mots :1e Rhetoricien emprunte ^
du Dialecticien les lieux des argumens : le Poëte,du Muficien ïesme- ^
fures : le Geometrien,de l'Arithméticien les proportions : les Meta- (
phy ficiens prennent pour fondement les coniectures de la Phy fique. j tf ;
Car chaque Science a fes principes prefuppofez, par où le iugement 1£(
humain eft bridé de toutes parts. Si vous venez à choquer cette bar- w
riere^en laquelle git la principale erreur,ils ont incontinent cette fen- ^
tence en la bouche,qu'il ne faut pas débattre contre ceux qui nient les j| K
principes. Or n'y peut-il auoir de principes pour les hommes, fi la diuiniténelesleurarcuelez
: de tout le demeurant, & le commence- ^
ment, & le milieu & la fin, ce n'eft que fonge & fumée. A ceux qui ^
combattentparprefuppofition,illeurfautprefuppoferau contrai-*
re, le mefme axiome dequoy on débat. Car toute prefuppofitionhu- J
maine, & toute enonciation a autant d'authorité que l'autre, fi la raifon
n'en fait la différence. Ainfi il les faut toutes mettre àla balance : ^
Perfuafwn de lacer- & premièrement les générales, & celles qui nous tyrannifent. La per- , tc
titudetqueçelt. r r~ i i i ° n • r • j\ c t• „ i>- • «
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lualio de la certitude, elt vn certain tel moignagc de rolie&d incertitude
extrême.Et n'eft point de plus folles gés,ny moinsPhilofophes, y
que les Philodoxes de Plato. 11 faut fçauoir fi le feu eft chaud, fi la nei 1
ge eft blache, s'il y a rien de dur ou de mol en noftre cognoiifance. Et
quant à ces refponfes, dequoy il fe fait des contes anciens : comme à "
celuy qui mettoit en doute la chaleur, à qui on dit qu'il fe iettaft dans l
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le feu: à celuy qui nioitla froideur de la glace, qu'il s'en mift dans le 1
fein: elles font tres-indignes de la profeifion philofophique. S'ils ^
nous euffent laiffé en noftre eftat naturel, receuans les apparences ^
eftrangeres félon qu'elles fe prefentent à nous par nos fens ; & nous ^
eulfent laifie aller après nos appétits fimples,& réglez par lacondi- ^