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5io ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
quelques marques empreintes de la main de ce grand Archite£te,&
qu'il n'y ait quelque imagées chofes du Monde rapportant aucunement
àl'ouurier, qui lesabafties ôc formées. Il a lailfé en ces hauts
ouurages le caradere de fadiuinité,& ne tient qu'à noftre imbécillité
, qite nous ne lepuiftionsdefcouurir. C'eft ce qu'il nous dit luymefme,que
fes opérations inuilibles, il nous les manifefte par les viiibies.
Sebonde s'eft trauaillé à ce digne eftude,6d nous monftrecomment
il n'eft pièce du Monde qui defmente fon facteur. Ce feroit
faire tort à la bonté diuine, IIl'Vniuers ne confentoit à noftre créance.
LeCiel ,1a terre, les elemcns, noftre corps ôc noftre ame, toutes
M O N D E , TEMPLE
chofes y confpirent : il n'eft que de trouuer le moyen de s'en feruir:
elles nous inftruifent, ii nous fommes capables d'entendre. Car ce
Monde eft vn temple tres-fain£t, dedans lequel l'homme eft intro-
T N S - F A I N Â . duit, pour y contempler des ftatu'ës, non ouurées de mortelle main,
mais celles que la diuine penfée a fait fenfibles, le Soleil, les eftoilles,
les eaux ôc la terre, pour nous reprefenter les intelligibles. Les chofes
inuilibles de Dieu, dit S .Paul, apparoiffent par la création du Monde,
Dieu n'a point e nui ê conftderant fa fapience éternelle, ôc fa diuinité par fes ceuures.
au Monde , la face & r > i
lafpea du cieL, qui ^Atque adeo faciem cœli non inuidet Orbï
roulant fans fin,expofe r r\ 1 ' r r ' r 11à
nos yeux fon vifage Ibje Dons, vultu que uos corpu que recludit
& fon corps à defcou- . r > i 1 f • r • 1 ».1 rC
ucn Luy mefme fe pre- ùcmper njoïuendo :Jeque ipjum inculcat g? offert;
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htm cognofcipofftt, docehque videndo
clairement cognoiftre, Qualis eat } doccâtque fuaS attendere levez.
nous înltruifant par la ^ >_ . I J , o
vcùe quelle eft ikGrï- Or nos^ailons & nos dilcours humains c elt comme la matière lourtiflani
d'écourer atten- de ôc fterile : la grâce de Dieu en eft la forme : c'eft elle qui y donne la
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' façon ôc le prix. Tout ainfi que les a&ions vertueufes de Socrates &
. de Caton demeurent vaines ôc inutiles pour n'auoir eu leur fin, ôc
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auoir regarde 1 amour ôc obeiflance du vray Créateur de toutes
GRÂCE DE D I E U , FOR- , I R i» a i ..rr i ^ i
ME DES DIJCOURS B U - . R O F J
M A I N S . choies, ôc pour auoir ignore Dieu: Ainfi eft-il de nos imaginations
ôc difeours : ils ont quelque corps, mais vne maffe informe, fans façon
ôc fans iour, fi la foy & la grâce de Dieu n'y font iointes. La foy
venant à teindre ôc illuftr-er les argumens de Sebonde, elle les rend
fermes ôc folides: ils font capables de feruir d'acheminement ,ôc de
première guide à vn apprentif, pour le mettre à la voye de cette connoiifance
: ils le façonnent aucunement, & rendent capable de la grâce
de Dieu, par le moyen de laquelle fe parfournit ôc fe parfait après
noftre créance. le fçay vn homme d'authorité nourry aux Lettres;
qui m'a confeffé auoir efté ramené des erreurs de la mefereance par
l'entremifedes argumens de Sebonde. Et quand on les defpouïllera
de cet ornement, Ôc du fecours ôc approbation de la foy, ôc qu'on les
prendra pour fantafles pures humaines, pour en combattre ccux qui
font précipitez aux efpouuentables ôc horribles ténèbres de l'irréligion;
ils fe trouueront encores lors, aufïi folides ôc autant fermes,
que nuls autres de mefme condition qu'on leur puiffe oppofer. De
façon que nous ferons fur les termes de dire à nos par ties,