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f& ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
Ce N'eft pas affez de luy roidir l'ame, il luy faut auffi roidir l.es mufcles;
elle eft trop preiféc,FI elle n'eft fécondée: & a trop à faire, de
feule fournir à deux offices. le fçay combien ahanne la mienne en
compagnie d'VN corps fi tendre, FI fenfible, & qui fe lailfe fi fort aller
fur elle. Et apperçoy fouuent en ma leçon, qu'en leurs Efcrits, mes
maiftres font valoir pour magnanimité & force de courage, des
exemples, qui tiennent volontiers plus de l'efpefliffuredelapeaucV
dureté des os. I'ay veu des hommes, des femmes, & des enfans, ainfi
nays-, qu'vne baftonade leur eft moins qu'à moy vne chiquenaude:
qui ne remuent ny langue ny fourcil aux coups qu'on leur donne.
'Uccoujïmdnce du Quand les Athlètes contrefont les Philofophes en patience, c'eft
tmuad , necejfaire pl uft 0ft vigueur de nerfs que de coeur. Orl'accouftumanceàporter
des le bm âge. trauail, eft accouftumancc à porter la douleur : labor caUum obducit
Si^tt/kÏÏeu?. Mort' Il ^ c a u t
^ rompre à la peine, & afpretédes exercices, pour le
cit. Thtfc. i. 2. dreffer à la peine, Se afpreté de la diflocation, de la colique, du cauftere:
Se de la geaule auffi, & delà torture. Carde ces derniers icy,
encore peut-il eftre cn prinfe, qui regardent les bons, félon le temps,
comme les mefehans? Nous en fommes à l'efpreuue. Quiconque
combat les loix, menace les gens de bien d'efeourgées Se de la corde.
ET puis, l'authorité du gouuerneur, qui doit eftre fouueraine fur luy,
s'interrompt Se s'empefche par la prefence des parens. Iointquece
refpccl: que la famille luy porte, lacognoiffance des moyens Se grandeurs
de fa maifon, ce ne font pas à mon opinion légères incom- .
Commerce des hom- moditez encétâge. EN cette efcolc du commerce des hommes,i'ay
fouuent remarqué ce vice, qu'au lieu de prendre cognoiffance d'autruy,
nous ne trauaillons qu'à la donner de nous: & fommes plus en
peine de débiter noftre marchandife, que d'en acquérir de nouuelle.
Le filcnee Se la modeftie font qualitez tres-comm'odes à la conuerfation.
ON dreffera CET enfant à eftre efpargnant Se mefnager de fa
Silence & mode, fuffifance, quand il l'aura acquife, Se à ne fe formalifer point des fotfi"'
tifes & fables qui fe diront en fa prefence : car c'eft vne inciuile importunité
de choquer tout ce qui n'eft pas de noftre appétit. Qùil
fe contente de fe corriger foy-mefme. ET ne femble pas reprocher
a u t r u
On peut eftre fa e fans * yj tout ce qu'il refufe à faire, ny contrafter aux mœurs publi-
faft, ny fans fe rendre ques. Licet fapere fine pompa }
o d i e u x & fafcheux. 1 1 J
fine inuidia. Fuye ces images regenteufes
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senec.^ft.u. du monde, Se inciuiles : Se cette puérile ambition, de vouloirparoiftre
plus fin, pour eftre autre ; Se comme fi ce fuft marchandife malaifée,que
reprehenfions Se nouuelletez, vouloir tirer de là, nom de
S i m i l i t u d e . i' 1
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quelque peculiere valeur. Gomme il n arhertqu aux grands Poètes.
Si Socrates&Anftip- j, r J \ i t» rr » CL \ r 1 1 ° » 1
p u s ont-fait quelque d vler des licences de 1 art : aulli n elt-illupportabie qu aux grandes
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ou " e s L œ u r s ames Se illufti'es, de fe priuilegier au deffus de la couftume. Si qmdSo-
cr^pasquc,ïiéf! crate
*&^r'ftppuscontramorem$f confuetudinemfeceruntjdemfibinearbi-
me l u y foit îoifibie : jis tretur licere:Ma