LE SYMPOSIUM INTERNATIONAL LE LIVRE. LA ROUMANIE. L ...

cantemir et le scénario moderne de la métaphysique 19
vision sur la Création et le monde et, plus particulièrement, sous forme de
repères salvateurs de la vie humaine 4 . elle devient ainsi la voie qu’il faut
suivre dans la vie, ce qui lui imprime finalement un caractère existentiel.
A travers cet ouvrage, Cantemir réalise la première partie d’une
trilogie, qu’il appelle la connaissance « théologo-physique ». les deux
autres parties, « théologo-métaphysique » et « théologo-éthique » n’ont
pas été publiées 5 . nous verrons que cette première partie, « théologophysique
», répond jusqu’à un certain point à des problèmes métaphysiques
de son époque, ce qui nous pousse à le considérer d’un certain point de vue
comme un ouvrage de métaphysique.
Il est connu que la métaphysique moderne s’appuie, à ses débuts,
lorsqu’elle se constitue en système théorique, sur une composition
quadruple : metaphysica generalis (aussi appelée ontologia), et trois
métaphysiques particulières : psychologia ou egologia (la recherche de
l’âme humaine), cosmologia (la connaissance de la nature et du monde
en général) et theologia (la doctrine sur l’être divin) 6 . rudolf Goclenius,
par exemple, l’auteur d’un dictionnaire connu, entend l’ontologie comme
réflexion philosophique sur l’être ou sur les transcendantales (ontologia,
id est philosophia de ente seu de transcendentibus) 7 . les transcendantales
auraient valeurs de « principes premiers », ce qui fait que leur investigation
devienne équivalente avec l’investigation de l’être en tant qu’être
(prima philosophia, scientia de ente qua ens). en tant que metaphysica
generalis, l’ontologie est aussi appelée philosophie première. À l’époque
moderne, elle gagne de l’importance surtout pour les autres branches de
la métaphysique 8 . A son tour, Descartes, prenant un virage spectaculaire
4 Ibidem, p. 23.
5 Ibidem, p. 192, 195-196. on pourrait croire que la connaissance « théologométaphysique
» et « théologo-éthique » font partie des préoccupations de Cantemir.
D’ailleurs on en retrouve partiellement de la première dans l’ouvrage mentionné (cf.
Metafizica, p. 195, 288) ; la deuxième, « théologo-éthique, est préfigurée par quelques
thèmes tant dans cet ouvrage (p. 192-287), que par des considérations plus explicites de
Divanul, 1698, ou dans d’autres écrits ultérieurs.
6 Des considérations particulièrement utiles se trouvent dans des ouvrages comme
ceux signés par Jean-François CourtIne, Suárez et le système de la métaphysique,
paris, puF, 1990 ; leo Freuler, « history of ontology », dans hans BurKhArDt,
Barry SMIth (dir.), Handbook of Metaphysics and Ontology, Munich, philosophia
Verlag, 1991.
7 Cf. rudolph GoClenIuS, Lexicon philosophicum quo tamquam clave
philosophiae fores aperiuntur, Francfort, 1613, l’article qui traite de « l’abstraction ».
8 parmi les exceptions, Johannes ClAuBerG qui, en évoquant Descartes dans son
ouvrage Elementa Philosophiae sive Ontosophiae, paru en 1647, considère que l’ontologie