LE SYMPOSIUM INTERNATIONAL LE LIVRE. LA ROUMANIE. L ...

486 OLIVIER PIcARD
imitations est révélatrice de la réception de la monnaie chez ces peuples :
elle atteste que leurs chefs ont besoin de numéraire pour participer à des
échanges sous forme monétarisée mais qu’ils ne jugent pas nécessaire
de créer leur monnayage propre. Ce genre de circulation monétaire dure
jusqu’à l’époque de la charte de pistiros, un des sites où ont été frappées de
telles imitations. Cette charte promulguée par un dynaste thrace accorde,
vers 360, un certain nombre de garanties aux emporoi venus de trois
cités de la côte, thasos, Maronée et une Apollonia qui est, selon toute
vraisemblance, Apollonia du pont. les seules opérations financières
expressément protégées par le texte sont des opérations de prêt au dynaste
lui-même et aux thraces. en revanche, bien que les rois odryses aient
eux-mêmes frappé monnaie, le contrôle qu’ils ont exercé sur les tribus de
l’intérieur n’a laissé aucune trace numismatique. D’autre part, les grandes
monnaies grecques du temps, en particulier les chouettes athéniennes, sont
absentes de la région.
les entreprises du roi de Macédoine philippe II en thrace ouvrent
la seconde période de l’histoire de l’utilisation de la monnaie dans les
Balkans. Je dénombre 13 trésors dont 4 au nord du Danube. Sept trésors
sont composés de tétradrachmes en argent, quatre de statères d’or, et deux
de bronze.
on remarque d’abord – et c’est une donnée qui se retrouvera toujours
par la suite – que la monnaie est maintenant sortie de la zone restreinte où
elle circulait jusque là. pour la première fois, des pièces du roi de Macédoine
franchissent la chaîne des Balkans, débordent au-delà du bassin de Sofia, et
parviennent au nord du Danube. les chiffres sont trop faibles pour qu’on
en tire trop de conclusion, mais on constate que le Danube ne représente
pas une barrière et que les peuples du nord ont le même développement
monétaire que ceux du Sud. or, ni philippe, ni Alexandre n’ont franchi
le Danube, le premier ne l’ayant pas atteint (on comprendra n’ayant pas
traversé la chaîne des Balkans), à en juger par un propos d’Alexandre
rapporté par Arrien. Cela signifie donc que la thésaurisation n’est pas
associée à la présence sur place de l’armée macédonienne.
Il est tout aussi remarquable que l’argent constitue à peine plus de la
moitié des trésors, une proportion d’autant plus faible que la part des trésors
de bronze est sans doute sous-évaluée, les trouvailles de ce numéraire ne
retenant pas autant l’attention que l’or ou l’argent. la très forte proportion
de trésors de monnaies d’or, près du tiers du total, est un phénomène tout à
fait remarquable, si on la compare aux proportions dans les trésors d’autres
régions. elle exclut – avec d’autres raisons – que ces monnaies soient venues
par voie de commerce, l’or n’étant pas un numéraire utilisé dans le commerce.