Correspondance des réformateurs dans les pays de langue française

14 JEAN CALVIN AU ROI DE FRANCE. 1536
«tela chair. Ceuxestoient Pères, desquelz Tan a dict, qu'un Moyne
qui ne laboure point de ses mains doibt estre réputé comme un
hrigant. L'autre, qu'il n'est pas licite aux Moynesde vivre du bien
d'autruy, mesmes quand ilz seroient assiduelz en contemplations,
en oraisons et à l'estude. Ilz ont aussi oultrepassé ceste borne,
quand ilz ont mis des ventres oysifz de Moynesen des bordeaux
(ce sont leurs cloistres), pour estre saouliez de la substance d'autruy.
Celuyestoit Père qui a dict, que c'estoit une horrible abomination
de voir une Image ou de Christ. ou de quelque Sainct, aux
temples des Chrestiens. Il s'en fault beaucoup qu'Uz ne gardent
ces limites,quand ilz ne laissent anglet vuide de symulacres en
tous leurs Temples. Un autre Père a conseillé, que après avoir par
sépulture exercé officed'humanité envers les mortz, on les laissast
reposer. Hz rompent ces limites, quand ilz requièrent qu'on aylt.
perpétuelle solicitude sur les trespasséz. Cestuy estoit au nombre
(les Pères qui a nyé qu'au Sacrement de la Cène, soubz le pain
feust contenu le vray corps de Christ, mais que seulement c'estoit
im mystère de son corps il parle ainsi de mot à mot. Ilz excèdent
donc la mesure, quand ilz disent,que le corps de Christ est là encloz
localement. Ceux estoient Pères, desquelz l'un ordonna, que
ceux feussent du tout rejettéz de l'usaige de la Cène lesquelz, prenans
l'une des espèces, s'abstenoient de la seconde. L'autre maintient
qu'il ne fault dénier au peuple chrestien le sang de son Seigneur,
pour la confession duquel il doibt espandre son sang. II/,
ont osté ces limites, quand rigoureusement ilz ont commandé la
inesme chose que l'un de ceux-là punissoit par excommunication,
l'autre par forte raison réprouvoit, Cestuyestoit Père qui affirmoit
estre une témérité, de déterminer de quelque chose obscure, en
une partie ou en l'antre, sans clairs et évidens tesmoignages de
l'Escriture. Ilz ont oublié ceste borne, quand ilz ont conclud tant
(le constitutions, canons et déterminations magistrales, sans quelque
parolle de Dieu.Cestuyestoit Père qui reprochoit à Montanus,
entre autres hérésies, qu'il avoit le premier imposé toix de jeûner.
Ilz ont aussi oultrepassé ces limites, quand par estroicte Idy ilz ont
ordonné les jeûnes. Cestuy estoit Père, qui a soustenu le mariage
ne devoir estre deffendu aux Ministres de l'Église, et a déclairé la
compaignie de femme légitime estre chasteté; et ceux estoient
Pères qui se sont accordéz à son auctorité. Ilz sont eschappéz
oultre de ceste borne, quand ilz ont ordonné l'abstinence de mariage
à leurs Prestres. Cestuy estoit Père qui a escript qu'on doibt