Correspondance des réformateurs dans les pays de langue française

356 CHAULESD'ESPEVILLB[*. CALVIN] A LOUISDU TILLET, A PABB. f 538
Quant aux raysons qui vous ont esmeu k ceste délibération, je
ne les puis pasappercevoir fort péremptoires. Je scé bien -que ma
conscience est assez asseurée devant Dieu du contraire, et espère
qu'elle sera jusques an jour qu'il faudra comparoistre à rendre
compte.Davantage,je suis bien abusé, ou j'ay tellement déelairé le
bon droit de ma cause 9,qu'un chascuns'en doibt contenter, n'estoit
que les uns se pardonnent trop facilement, les autres vouldroient
bien donner entrée à Jésus-Christ par les voies où il ne veult nullement
cheminer. Je n'ay nullement doublé que les personnages
dont vous faictes mention10, n'eussent aucunement aydé, sans y
penser, à vous faire prendre une telle conclusion, combien qu'en
touchant.ce propos par lettres àmoyescriptes, Usle dissimulenttx.
Et certes la grande doctrine et piété qui est en eulx a grande apparence
pour donner authorité à telles consultations. Mais je suis
bien asseuré qu'en ceste matière, j'auré, oultre les vives raysons,
plus de couleur que eux, quand j'auré prins un masque pour me
faire apparoistre semblable à eulx. Ils me contraingnent run et
rautre, par leurs manières de fère, de désirer en eulx plus grand'
fermeté et constance Quelque crédit qu'on ait, si ne faict-iljamais
bon d'estre tant libéral à espandre le bien d'autruy, et si
nous avons à nous garder de fère largesse aux despans des hommes,
quelle caution doibt estre auprès à dispenser la vérité de
Dieu, laquelle il ne nous commect pas pour en rien diminuer 1S.
n. 15; 624, renv. de n. 7, 8), on pourrait inférerque Louis du THIet
avaiten quelquesorte promisde prêchersoità Thonon,soit dansles villagesvoisinsde
Lausanne.
Allusionà VInstitutionchrétiennede Calvin.
10
Capitonet Bucer.
Les théologiensde Strasbourgn'avaientpas de motifspour c dissimuler»
le retour en France de Louisdu TiUet,puisqu'ilsle croyaient
encoreuni de cœur et de principesavec eux. On lit, en effet,dansla
lettre queBucerlui écrivitle 8 octobre1539 « Hocmagiscruciat quôd
hodiein multiste dissentireà mescribis,qui, cum Mncdiscederes, tam
pukhrè éonsentiébas in omnibus,ita sanè mentem tuam ego mtellexi»
(Copieancienne.Manuscritcité, note 1. Notre amiM. Henri Bordiera
bfâtfvoulunousprocurerla transcriptionde cette lettre importante).
Acompareravecle N° 677,renvoisde note 80-84.
Noussuivonsle texte de M. JulesBonnet(Lettresfranc, de Calvin,
1, 4), quinousparait avoir,dans cepassage,rendu plusfidèlementl'original.Le
texte de M. Crottetporte: « quellecautiondoibt estre auprès
à dispenserla charité de Dieulaquelleil ne nousconvientpointen rien
diminuer.»