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documents pour servir a l'histoire

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L'assassinat du commissaire de police, Longville, froidement exécuté<br />

sous les yeux <strong>pour</strong> ainsi dire de sa femme et de ses enfants, mérite<br />

d'être raconté dans tous ses détails. C'est M" e Jeanne Longville ellemême,<br />

la fille de l'infortunée victime, qui va nous retracer cette scène<br />

de barbarie.<br />

N° 427. Nous avions passé la nuit chez notre voisin M. Lesuisse. Le dimanche 23 août,<br />

vers 5 heures du matin nous étions à peine rentrés chez nous, rue Saint-Pierre<br />

(fig. an, n° 15), au coin de la rue Benjamin Devigne, que mon père, Félix Longville<br />

(fig. 58), nous quitta — il était commissaire de police (1) — <strong>pour</strong> se rendre à<br />

l'hôtel de ville. Dix minutes après, il nous revenait, déclarant qu'il était impossible<br />

de circuler en rue, les balles pleuvant de partout.<br />

Un peu après midi, nous apercevons des Allemands près de l'église Saint-<br />

Pierre, qui se trouve juste en face de la rue des Orfèvres. Bientôt nous entendons<br />

les soldats s'acharnant sur les portes de la maison Sizaire et de la gendarmerie; ils<br />

arrivent à la nôtre. Ils s'en prennent aux volets mécaniques qui volent en éclats;<br />

entendant cela, papa propose d'aller leur ouvrir et de leur offrir à boire et à<br />

manger. En voyant mon père, les soldats s'écrient comme des fous : « Un homme,<br />

un homme ! » et, le prenant par les épaules, ils l'entraînent dehors. Je veux le<br />

suivre, mais les soldats me repoussent à l'intérieur, ainsi que ma mère et ma sœur<br />

Léonie. A l'un d'entre eux, je dis : « Vous n'allez cependant pas le tuer? — Mais<br />

si, me répond-il en riant. » Et, avant qu'il ait eu le temps de m'arrêter, je m'élance<br />

dans la rue. Je vois là mon père essayant de parlementer avec des soldats qui<br />

l'entouraient, et l'un d'eux, lui donnant un coup de crosse de fusil dans le dos,<br />

le pousse la face contre le mur; mon père se retourne et présente la face aux<br />

soldats. Pendant ce temps je m'étais mise à genoux et je les conjurais de ne pas<br />

exécuter le crime qu'ils méditaient, mais ils me regardaient tous en ricanant. A ce<br />

moment, j'entends maman qui supplie un soldat de la laisser sortir, et je rentre<br />

<strong>pour</strong> l'empêcher d'être témoin de cet horrible spectacle. A peine suis-je auprès<br />

d'elle, que j'entends un coup de feu et la chute d'un corps sur le pavé.<br />

Les soldats, après s'être assurés qu'il n'y avait plus d'autres hommes dans la<br />

maison, se mirent à visiter les immeubles voisins, nous laissant à notre triste sort.<br />

J'avais encore le secret espoir que mon père n'était que blessé, et, malgré les vives<br />

instances de maman, je sortis. Hélas ! il était bien mort ; la balle avait emporté<br />

tout le sommet de la tête du côté gauche, l'œil même avait disparu, le sang et la<br />

cervelle avaient éclaboussé le mur jusque bien haut. Pour que maman ne vît pas<br />

cette horrible blessure, aidée de Léonie, j'enveloppai la tête de mon cher papa<br />

avec des serviettes et nous le traînâmes jusque dans la cave, où nous le déposâmes<br />

sous un matelas.<br />

N'entendant plus de soldats dans la rue, nous nous sommes sauvées chez<br />

M lle Sizaire, notre plus proche voisine, et avec elle nous avons passé le<br />

reste de la journée, nous cachant au jardin quand l'ennemi entrait dans la maison.<br />

(t) Des cinq policiers qui étaient restés à Dinant le i3 août 1914 — les autres étaient mobilisés — quatre<br />

furent tués.<br />

til

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