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documents pour servir a l'histoire

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La journée du mardi fut marquée par de nombreux incidents. J'en relève<br />

quelques-uns seulement.<br />

Un jeune homme, René Gaudinne, en s'écartant <strong>pour</strong> satisfaire un besoin<br />

naturel, songea à s'éclipser : il fut tué dans sa fuite. Nous vîmes aussi arriver ce jour<br />

Paul Vanheden, un escape de la fusillade du mur Tschoffen. Il y avait été grièvement<br />

blessé et était tout couvert de sang. Il paraissait avoir les deux bras cassés. Néanmoins,<br />

des soldats s'emparèrent de lui, et lui lièrent brutalement les bras derrière<br />

le dos. La douleur du malheureux nous inspira à tous une profonde pitié. Après<br />

l'avoir ainsi ligoté, les soldats le jetèrent dans un groupe d'une quarantaine<br />

d'hommes qui étaient liés.<br />

La faim nous tiraillant davantage, la situation devenait de plus en plus critique.<br />

Les enfants ne cessaient de pleurer et de crier. C'est dans ces conditions que<br />

s'écoula la nuit du mardi au mercredi.<br />

C'est pendant cette nuit que Charles Pinsmaille, ayant perdu la tête, fut installé<br />

à part au pied d'un arbre. Il était devenu fou et tenait des propos incohérents. Un<br />

moment donné, il se leva et alla se jeter dans la Meuse. Un soldat qui jouait avec<br />

un chat, le vit, prit son fusil et le tua. D'autres soldats le repêchèrent, tout en<br />

ricanant et en s'amusant. Séance tenante, ils lui creusèrent une fosse et l'y<br />

enterrèrent.<br />

Le mercredi, la situation devint intenable. Plusieurs étaient menacés de folie et<br />

manifestaient des symptômes inquiétants. M me Robert, puis M me Sury et d'autres<br />

encore perdirent connaissance. Je priai alors un officier de pouvoir aller chez<br />

moi chercher des vivres. Il me demanda où se trouvait ma maison, et, les indications<br />

données, i! me répondit qu'il irait lui-même. En effet, après quelque temps,<br />

je vis des soldats revenir avec mes bicyclettes et plusieurs mannes d'aliments. L'officier<br />

me dit : « J'ai pris les vivres <strong>pour</strong> mes soldats, parce qu'ils ont faim ». Je<br />

m'écriai alors : « Et vous ne donnerez rien aux civils, rien aux femmes et aux<br />

enfants ! » Il consentit à me donner fort peu de chose, puis il ajouta : « J'ai tué votre<br />

chien à la cuisine, parce qu'il était trop méchant, et j'ai pris vos bicyclettes parce<br />

que mes soldats en ont besoin ».<br />

Enfin, à force d'instances, j'obtins l'autorisation de faire une tournée dans le<br />

village <strong>pour</strong> y recueillir des vivres. Je me mis donc en route, accompagné de quatre<br />

soldats portant des mannes. J'allai d'abord jusqu'à l'extrémité du village, disant à<br />

tous ceux que je rencontrais de me préparer des vivres, que je repasserais peu<br />

d'instants après. Puis, revenant sur mes pas, je recueillis, au fur et à mesure, tout<br />

ce qui m'avait été préparé. Je revins dans la prairie avec plusieurs mannes d'aliments.<br />

Tout le monde se précipita sur la nourriture et j'eus beaucoup de peine à<br />

établir un partage équitable. Je me chargeai notamment des quarante hommes liés.<br />

Ils ouvraient la bouche, comme de petits enfants exténués, <strong>pour</strong> attraper un morceau<br />

de pain. Ils criaient : « A moi, Monsieur Dony, à moi ! »<br />

Un certain nombre de femmes obtinrent aussi l'autorisation de se rendre dans<br />

les maisons non incendiées. C'est ainsi que M me de Terwagne fut installée dans un<br />

grenier. A la fin de la journée, toutes les femmes furent remises en liberté, et, la nuit,<br />

les hommes purent aussi s'en aller. J'entrai chez Alphonse Gaudinne où je retrouvai<br />

M. le Curé de Saint-Paul et le docteur Vermer. Nous y fûmes de nouveau menacés<br />

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