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documents pour servir a l'histoire

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204<br />

Nous avons passé la nuit à la belle étoile sur la pelouse du château. Le lundi,<br />

nous avons accompagné d'autres prisonniers de Dinant à Taviet où l'on nous a<br />

relâchées, en nous interdisant toutefois de retourner à Dinant. La nuit du lundi à<br />

mardi, nous la passâmes sur de la paille à Boisseilles. Le mardi, nous obtînmes,<br />

ma fille et moi, un passeport <strong>pour</strong> Conneux, où je fus hébergée chez ma sœur.<br />

Le vendredi, 28 août, j'ai voulu rentrer chez moi avec ma fille, mais en approchant<br />

du château, à deux cents mètres environ, on tira sur nous, et on nous a <strong>pour</strong>suivies<br />

jusqu'au bois de Foy. Ce n'est que le lundi, 3t août, que nous avons pu enfin<br />

parcourir les ruines de la ferme. D'après des témoins oculaires, le feu n'y avait été<br />

mis que le mardi, 25 août (1), et préalablement les soldats avaient tout pillé,<br />

notamment une somme de 5ooo francs, cachée dans la cave. Je n'ai même pu<br />

retrouver le cadavre de mon fils Joseph, car, sur l'ordre des Allemands, l'autorité<br />

civile de Dinant avait brûlé le corps sur le fumier de la ferme.<br />

J'avais donc perdu en cette journée du 23 août 1914, mon mari et mes trois fils<br />

(fig. 83); il ne me restait plus que ma fille. Outre ces pertes irréparables, les<br />

Allemands m'avaient ruinée (2).<br />

"Rapport de Joseph Marol, fermier.<br />

N° 478. Dès 6 heures du matin, le 23 août, la ferme est envahie, et pendant que des<br />

soldats nous tiennent en respect, dans une place au rez-de-chaussée, d'autres fouillent<br />

la maison de la cave au grenier. L'un d'eux, d'une chambre du premier étage<br />

tire un coup de feu. Aussitôt les autres se précipitent sur nous et nous accusent<br />

d'avoir tiré sur leurs hommes. Heureusement que le soldat en question, en<br />

descendant, avoue avoir tiré par mégarde.<br />

Bientôt la bataille bat son plein et des brancardiers viennent en hâte tout<br />

réquisitionner, des échelles <strong>pour</strong> transporter leurs blessés et de la paille <strong>pour</strong> les<br />

y déposer. Après les avoir satisfaits, je descends dans la cave avec ma femme et<br />

mes enfants, <strong>pour</strong> m'y mettre à l'abri des projectiles. Mais soudain j'entends crier<br />

« Au feu ». En effet, une bombe était tombée clans un fenil et les progrès de<br />

l'incendie devenaient menaçants. Je dis à ma femme de s'enfuir et de <strong>pour</strong>voir à sa<br />

sécurité, ainsi qu'à celle des enfants, tandis que je me rends dans les écuries et les<br />

étables <strong>pour</strong> y lâcher le bétail. Je m'éloigne enfin moi-même avec un superbe<br />

étalon auquel je tenais beaucoup. Mais je me rends bien vite compte que je suis<br />

trop exposé au feu des Français, et après avoir attaché mon cheval à un arbre, près<br />

de l'étang, je vais me cacher dans un tas de froment, où je demeure jusqu'au soir.<br />

A la tombée du jour, n'entendant plus le bruit du canon, je crois pouvoir me<br />

risquer et je m'avance dans la direction de la ferme; mais, arrivé près du château,<br />

des soldats m'arrêtent et, après m'avoir visité, me lient les mains derrière le dos.<br />

(1) Le mardi, en accompagnant sur les hauteurs des officiers allemands en quête d'un château <strong>pour</strong> leurs<br />

blessés, l'abbé Jouve, curé de Saint^Paui, vit [a ferme Alardo tout en feu.<br />

(2) La ferme n'était plus qu'un monceau de ruines, et par l'incendie ou le vol M me Alardo avait perdu :<br />

17 chevaux, dont un étalon qu'un officier (von Hammerstein) a abattu près de la ferme, 28 vaches et génisses,<br />

14 cochons, 5oo poules, 10 oies, i5 canards. Toutes les avoines avaient péri : la récolte de 32 hectares.<br />

Les Allemands ont volé 100 sacs de froment et autant de seigle ; enfin ils ont brûlé 116 charretées de fourrage.

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