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documents pour servir a l'histoire

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a 64<br />

sommes obliges de l'abandonner au bord de la route. Nous le retrouverons plus<br />

tard à Marche où il fut transporté après avoir été soigné à l'ambulance de<br />

Sorinne (t).<br />

Notre colonne arrive à Achêne. La route étant obstruée par des chariots et<br />

des troupes, on nous range sur le côté. C'est pendant cet arrêt d'une demi-heure<br />

que nous fûmes livrés à toutes sortes d'avanies. Plusieurs Pères reçurent des<br />

crachats sur la face; d'autres, des poignées de boue; quelques-uns, des coups de<br />

bâton, de cravache, et des verres d'eau lancés en pleine figure. Un soldat voulut<br />

même reproduire YAve "Rex de la Passion de Notre Seigneur. Il se mettait à genoux<br />

devant le Père Sous-Prieur et, avec des gestes diaboliques, singeait, les mains<br />

jointes, des prières qui étaient des blasphèmes. Tout le vocabulaire des grossièretés<br />

fut employé contre nous, et les qualificatifs les plus orduriers nous furent servis.<br />

C'est ainsi que, dans un pré de Leignon où nous venions d'arriver vers i3 heures,<br />

<strong>pour</strong> y attendre la première distribution de pain, un officier à cheval fonce sur<br />

notre groupe, interpelle grossièrement le R me P. Abbé, et, après l'avoir insulté, lui<br />

donne un coup de cravache sur la tête. Le coup fait rouler à terre la barrette<br />

blanche du prélat, et l'officier s'éloigne en riant avec ses compagnons.<br />

Remis en marche, nous continuons le chemin sous les huées et les menaces<br />

des troupes qui nous croisent. On souffre de la faim et de la soif. Parfois, en<br />

passant près des maisons, une femme charitable, un homme compatissant essayent<br />

de nous porter quelque nourriture ou un peu de boisson, mais, menacés par la<br />

baïonnette des gardes, ces pauvres gens se détournent et se contentent de pleurer<br />

sur notre sort. On leur permet bien de donner aux autres civils, mais défense<br />

rigoureuse de s'approcher de ces sales papistes.<br />

Le Père Abbé et cinq autres religieux étaient épuisés. Nous dûmes les laisser<br />

près d'un fossé; heureusement, un officier, plus humain, réquisitionna une auto<br />

qui passait et les fit conduire à Marche. Nous-mêmes, nous n'arrivâmes vers<br />

ao heures, qu'à 5 ou 6 kilomètres de la ville. On nous fit faire halte dans une prairie<br />

et, un peu plus tard, on nous permit de monter dans les mansardes d'une maison<br />

abandonnée où nous passâmes le reste de la nuit étendus sur le parquet nu.<br />

Le lendemain, vers 7 heures, on se remit en route et, une heure après, nous<br />

arrivions à Marche. La gare d'embarquement <strong>pour</strong> l'Allemagne était encore<br />

à 12. kilomètres. On fit halte dans un champ.<br />

Que s'était-il passé à l'arrivée du Père Abbé et de ses compagnons à Marche?<br />

Ils furent conduits à l'ambulance établie dans la maison du notaire Jadot. Leur état<br />

d'épuisement était tel qu'il excita la pitié de tous ceux qui les virent. Les autorités<br />

militaires furent-elles mises au courant de la situation ? On ne sait. Toujours est-il<br />

que nous attendions le signal du départ <strong>pour</strong> Melreux, lorsque trois officiers,<br />

accompagnés du commandant local, vinrent nous dire que les ecclésiastiques<br />

n'iraient pas plus loin et qu'ils seraient emprisonnés à Marche même. Le lieutenant<br />

Kuntz nous conduisit alors au couvent des Carmes. Il imposa silence aux soldats<br />

qui bordaient la route et recommençaient à nous insulter, nous introduisit dans<br />

le cloître et nous présenta au Père Prieur des Carmes.<br />

(1) Voir t. IV., p. 119.

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