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documents pour servir a l'histoire

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pas touché, je fais le mort. Finalement, n'entendant rien, je me soulève et je vois<br />

près de moi M. Virez cligner de l'oeil. « Silence, dit—il, ne bougeons pas ! » Enfin,<br />

n'y tenant plus, je me lève et que vois-je? Les soldats rire aux larmes ! Je dis alors à<br />

mes compagnons : « Relevez-vous tous, c'est une indigne comédie ». Je me retourne<br />

et j'aperçois au-dessus du fort des casques à pointe. C'étaient ces soldats qui, <strong>pour</strong><br />

nous effrayer, avaient fait le coup de feu dans notre direction. Un officier a néanmoins<br />

le toupet de me dire : « Vous voyez bien qu'il y a encore des francs-tireurs<br />

là-haut ! »<br />

Nous reprenons bientôt notre marche dans la direction de Leffe. On nous<br />

arrête au seuil de l'école régimentaire et on sépare les femmes et les enfants qu'on<br />

conduit à l'abbaye des Prémontrés. Quant à nous, on nous fait entrer dans la cour<br />

au fond de laquelle sont placées deux rangées de soldats. On nous met bien en face,<br />

à quelques mètres de distance, sur deux lignes. J'étais avec M. Virez au premier<br />

rang. Les soldats étaient armés de leurs fusils et je les regardais attentivement épiant<br />

tous leurs gestes, quand subitement je me sens tiré par derrière. Je me retourne, et<br />

je vois un Allemand qui me dit à l'oreille : « Que votre révérence se rassure, elle<br />

ne sera pas fusillée ; il y en a quatre qui seront fusillés, mais ils ne sont pas ici.<br />

Dites cela aux autres » (i).<br />

Quelque temps après, on nous enferme dans des chambres à l'étage où nous<br />

recevons un verre d'eau. Nous étions à trente-neuf dans une salle qui pouvait tout<br />

au plus contenir dix personnes. C'est là que nous dûmes passer les longues journées<br />

du mardi et du mercredi, recevant deux fois en tout un peu de riz et de l'eau.<br />

Le jeudi, 2.7 août, vers 11 heures du matin, on me fait passer dans un bureau<br />

où l'on me délivre un billet qui porte ces mots : « Relâché de l'étape de Leffe,<br />

non suspect ». Signé : Schubert.<br />

L'après-midi de ce même jour, accompagné de l'abbé Delacharlerie, je me<br />

rends à l'église dont j'ouvre la porte, en ayant seul les clés. Je trouve tout<br />

sens dessus-dessous, les chandeliers enlevés, les troncs défoncés, etc. Intrigué, me<br />

demandant comment on était parvenu à pénétrer dans l'édifice, je vais jusqu'au fond<br />

du sanctuaire, j'ouvre le tambour et je vois une des portes entièrement consumée,<br />

le haut brûlait encore. On avait donc dû y mettre le feu le jour même.<br />

Le vendredi 28 août, je vois des Allemands arrêtés sur l'escalier de la citadelle.<br />

Je m'approche et j'aperçois par terre sur un des paliers le tronc d'une femme carbonisée,<br />

toute noire. Impossible de la reconnaître, mais j'enlève une chaîne qu'elle<br />

portait au cou et à laquelle pendaient des médailles et une croix. Grâce à cela on put<br />

(1) Des cinq policiers qui se trouvaient à Dînant !e i3 août, quatre avaient été tués : le commissaire<br />

Longville, le commissaire adjoint Roba, et les agents R. Anciaux et Octave Hubert ; Detal seul était encore<br />

en vie. Fait prisonnier chez lui (coin de la rue des Orfèvres et quai de Meuse) le lundi, il est conduit avec<br />

les autres civils à l'école régimentaire. Le lendemain, des officiers, sur l'indication de Gustave Beyer,<br />

dinantais d'origine allemande, font comparaître Detal et lui demandent s'il connaît quatre individus ligotés<br />

qui se trouvaient rangés contre le mur de la salle. Detal répond affirmativement- C'étaient Jules Charlier,<br />

Alexis Hansen, Hubert Menu et Camille Romain. « Ces civils, s'écria un officier, ont été trouvés détroussant<br />

les cadavres. » Ht, comme pièces à conviction, sur la table se trouvaient trois ou quatre portefeuilles bourrés de<br />

billets de banque et deux couteaux tout couverts de sang. Tous les quatre furent exécutés le mercredi matin<br />

dans le jardin de la brasserie Jaumotte. (N. B. — Jules Charlier et Camille Romain étaient des « escapes » de<br />

la fusillade du mur Tschoffen.)<br />

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