Hyperlien - Les Classiques des sciences sociales

4.1. On n'a jusqu'& maintenant parlé que de sourds et d'entendants
et trop souvent la Littérature consacrée au sujet ne va pas plus
loin dans la nuance, opposant ainsi schématiquement deux blocs ou
plut& deux types d'enfants ; l'entendant d'un CM, le sourd profond
de l'autre, privé de tout reste auditif utilisable et difficilement appareillable.
Mais on sait que la réalité est infiniment plus complexe.
Tout classement, toute ~ologie impose à la variété, à la continuité
du réel des tiroirs, c'est-&-dire des cloisons, des discontinuités. Parler
de surdité moyenne, sévère, profonde, reste utile certes (sinon l'infinie
diversité du reel n'est plus maîtrisable par le discours) et correspond
d'ailleurs & une certaine homogénéité de comportement des
sujets qui, en gros, justifie cette partition ; mais i< en gros » seulement.
En réalité, si I'on fait intervenir tous les paramètres qui constituent
un individu déficient auditif (les potentialités de l'enfant et son
histoire propre, le rBle de la famille, l'âge d'atteinte, le degré de
perte auditive et mille autres facteurs ...) on aboutit à une myriade de
cas individuels, du déficient léger ou moyen dont la surdité passe inaperçue
pour un observateur non averti jusqu'au sourd profond
incapable d'utiliser la parole, mais aussi du mal-entendant pratiquement
sans langage jusqu'au sourd ingénieur ou professeur de percussions
!
On ne peut être que surpris quand on voit certains zélateurs du
bfigukme proposer leur solution pour tous les enfants deficients
auditifs, sans plus de nuance, alors que I'on connaît (surtout dans les
classes spécialisées de l'Education nationale) bon nombre de malentendants
dont la surdité moyenne, bien dépistée, bien appareillée,
ne se traduit, aprbs une bonne éducation précoce, que par quelques
difficultés d'articulation, un français légèrement lacunaire et un petit
retard scolaire ; il n'est pas sOr que ces enfants se reconnaîtraient,
forgeraient leur identittr, dans une communauté de sourds,
Pour ces mêmes raisons, il faut dénoncer certaines attaques ironiques
ou virulentes contre les possibilités prothétiques, présentées
comme une sorte d'acharnement thérapeutique sans fondement
(comme si la spécificité sourde avait besoin, pour exister, de nier
toute information auditive possible), alors que pour un grand