Hyperlien - Les Classiques des sciences sociales

dans un espace sacré où des investissements généreux s'imposent. Ils
ne se justifient ni ne s'évaluent en termes de rentabilité économique.
On est en effet enclin à mesurer i'insertion de chacun à i'aune de
ce que la société lui offrirait. Il y aurait des privilégiés que la société
a gâtb, et les exclus, ayant moins rqu, ou incapables de tirer un véritable
profit de qui leur a été donné. Il me paraît plus judicieux de
mesurer au contraire l'intégration de chacun à partir de ce qu'il apporte.
Et il en est des groupes sociaux comme des individus, ils
n'existent au monde, ils n'y participent, ils n"y apportent et n'en reçoivent
que pour autant qu'ils s'y présentent et s'y affirment dans
leur spécificité.
Les exclus, les périphériques, les marginaux seraient alors ceux
qui, en raison de ce qu'ils sont, n'apporteraient rien. Ou plus exactement
ceux dont on n'attend rien et/ou dont on ne veut surtout rien
recevoir. Ceci parce qu'on estime, à tort ou à raison, qu'ils sont incapables
d'un apport véritable ou que cet apport ne peut pas être bon.
Inutiles, mauvais, dangereux, ils sont en quelque sorte condamnés
par avance, c'est là leur définition, à ne pouvoir jamais offrir ce
qu'ils ont de sp6cifique et à ne devoir dans le meilleur des cas que
toujours recevoir.
Mais venons-en aux sourds et à la langue des signes.
Cette dernic?re fut pendant des décennies l'objet d'un grand mépris
de la part de toutes les personnes engagées à un titre ou à un
autre dans teducation des jeunes sourds. Elles la considéraient
comme un moyen de communication primitif. Elles la trouvaient
laide, voire animalesque, pauvre, inapte à exprimer l'abstraction, les
nuances, les sentiments élevés, les sentiments profonds. Que sais-je
encore ? Ces éducateurs, qui voulaient à coup stlr le bien de leurs
élkves, n'auraient cependant pas déployé tant d'énergie à la com-