Hyperlien - Les Classiques des sciences sociales

La parole ne vaut qu'adressée ii l'autre, ce n'est pas un produit
pur.
Des résultats de l'enquête se déduiront quelques conséquences :
- les mécanismes qui contribuent à faire de la clinique avec les sourds
une clinique imprecise. L'obstacle principal provenant pour le psychiatre
de ce que parole et écoute promues au rang d'indispensable
support ne trouvent plus à s'expérimenter dans la pratique de l'entretien
selon les modalités habituelles, provoquant le désarroi puis
le rejet de l'interlocuteur sourd, La surdité est un handicap qui se
partage ;
- les questions spcdcifiques que sont l'appel à l'interprète et le recours
à l'&rit ;
- enfin les perspectives immédiates qui peuvent etre proposées pour
répondre la carence constatée dans l'accueil psychiatrique des
sourds.
Dans un deuxième temps, nous ferons quelques remarques cliniques
partant de notre expérience. L'enseignement que nous en tirons,
à contre-pied de ce qui a pu s'écrire, nous amène i souligner
l'absence de psychopathologie propre aux sourds. Nous tgcherons de
nous en expliquer.
Notre place nkessite, pour faire exister la condition même d'un
questionnement et d'un abord clinique, rien moins que la reconnaissance
des sourds comme êtres de langage. Une fois ce geste accompli,
il devient evident que les sourds peuvent avoir des symptômes et
qu'ils peuvent également bénéficier de lieux pour dire leurs angoisses.
Pas plus fous que les autres, mais pas moins non plus.
Si, comme l'écrit le Docteur Jacques Lacan (Ee&, p. 166) : i< Le
phénomène de la folie n'est pas séparable du problème de la signification
pour l'être en général, c'est-à-dire du langage pour l'homme »,
il nous apparaît plus clairement qu'à dénier toute parole propre aux
sourds on leur dénie ce qui est proprement humain, car e loin donc
que la folie (...) loin qu'elle soit pour la liberté une insulte (...) l'être
de l'homme, non seulement ne peut être compris sans la folie, mais il
ne serait pas l'être de l'homme s'il ne portait en lui la folie comme la
limite de sa liberté, »