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Arthur de Gobineau, Essai sur l’inégalité des <strong>races</strong> humaines, (1853-1855) Livres 1 à 4 247<br />

dans les Tyriens, avec lesquels ils n'avaient pu vivre, c'était moins le foyer du culte<br />

national que le libre passage des marchandises vers l'Asie. Voici maintenant un second<br />

fait qui redouble l'évidence des déductions à tirer du premier.<br />

Quand les rois perses se furent emparés de la Phénicie et de l'Égypte, ils<br />

prétendirent considérer Carthage comme conquise ipso facto et légitimement unie au<br />

sort de son ancienne capitale. Ils envoyèrent donc des hérauts aux patriciens du lac<br />

Tritonide pour leur donner certains ordres et leur faire certaines défenses. Carthage<br />

alors était fort puissante ; elle avait peu sujet de craindre les armées du grand roi,<br />

d'abord à cause de ses énormes ressources, puis parce qu'elle était bien loin du centre<br />

de la monarchie persane. Pourtant elle obéit et s'humilia. C'est qu'il fallait à tout prix<br />

conserver la bienveillance d'une dynastie qui pouvait fermer à son gré les ports<br />

orientaux de la Méditerranée. Les Carthaginois, politiques positifs, se déterminèrent,<br />

en cette occasion, par des motifs analogues à ceux qui, aux XVII e et XVIII e siècles,<br />

portèrent plusieurs nations européennes, désireuses de conserver leurs relations avec le<br />

Japon et la Chine, à subir des humiliations assez dures pour la conscience chrétienne.<br />

Devant une telle résignation de la part de Carthage, et lorsqu'on en pèse les causes, on<br />

s'explique que les colonies phéniciennes aient toujours montré un esprit bien éloigné de<br />

toute velléité de révolte.<br />

Du reste, on se tromperait fort si l'on croyait que ces colonies se soient jamais<br />

préoccupées de la pensée de civiliser les nations au milieu desquelles elles se<br />

fondaient 1 . Animées uniquement d'idées mercantiles, nous savons par Homère quelle<br />

aversion elles inspiraient aux populations antiques de l'Hellade. En Espagne et sur les<br />

côtes de la Gaule, elles ne donnèrent pas une meilleure opinion d'elles. Là où les<br />

Chananéens se trouvaient en face de populations faibles, ils poussaient la compression<br />

jusqu'à l'atrocité, et réduisaient à l'état de bêtes de somme les indigènes employés aux<br />

travaux des mines. S'ils rencontraient plus de résistance, ils employaient plus d'astuce.<br />

Mais le résultat était le même. Partout les populations locales n'étaient pour eux que<br />

des instruments dont ils abusaient, ou des adversaires qu'ils exterminaient. L'hostilité<br />

fut permanente entre les aborigènes de tous les pays et ces marchands féroces. C'était<br />

encore là une raison qui forçait les colonies, toujours isolées, faibles et mal avec leurs<br />

voisins, de rester fidèles à la métropole, et ce fut aussi un grand levier dans la main de<br />

Rome pour renverser la puissance carthaginoise. La politique de la cité italienne,<br />

comparée à celle de sa rivale, parut humaine et conquit par là des sympathies, et<br />

finalement la victoire. Je ne veux pas ici adresser aux consuls et aux préteurs un éloge<br />

peu mérité. Il y avait grand moyen de se montrer cruel et oppressif en l'étant moins<br />

que la race chananéenne. Cette nation de mulâtres, phénicienne ou carthaginoise, n'eut<br />

jamais la moindre idée de justice ni le moindre désir d'organiser, je ne dirai pas d'une<br />

manière équitable, seulement tolérable, les peuples soumis à son empire. Elle resta<br />

1 Rien de plus ridicule que le sens philanthropique attribué par quelques modernes au mythe de<br />

l'Hercule tyrien. Le héros sémite et ses compagnons se donnaient des torts et ne redr<strong>essai</strong>ent pas<br />

ceux des autres.

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