21093 T4.pdf

138 ÉTUDES SUR LA KABILIE.
Aussi est-ce à un autre ordre d'observations qu'ap
partient la nuance décisive.
En étudiant dans ses détails les plus minutieux la
physiologie de toutes ces tribus berbères,
nous avons
été frappé d'un fait qui résume à lui seul toute la dif
férence entre le pays des Kabiles et ce que nous appe
lons d'un nom spécial la Kabilie : c'est que sur la ligne
de Bougie à Djîdjel il existe un point où le caractère
des habitations se modifie brusquement et perd cet air
d'aisance et de propreté relatives qui distingue les en
virons de Bougie. L'Ouad-Aguerioun est la limite où
ee brusque changement s'opère : c'est le Rubicon du
luxe kabile. On tombe alors dans un pays d'un aspect
pauvre et malpropre dont les habitants sont obligés de
chercher dans l'expatriation leurs moyens d'existence,
et dont la contribution , disent-ils eux-mêmes , n'eût pas
valu les dépenses nécessaires pour la percevoir. Les
demeures sont en harmonie avec le sol et sentent la
misère comme lui. Ce sont de chétives cabanes, cons
truites en pierres sèches , couvertes en chaume , et en
duites en bouse de vache. Encore cet ornement gros
sier n'est-il appliqué qu'avec parcimonie et seulement
à l'intérieur.
Le passage subit de l'aisance à la misère , la dissem
blance organique dans les habitudes et dans les res
sources de la vie, tracent une ligne de séparation na
turelle , organique , entre les deux contrées qui servent
de terme à la comparaison. Aussi adoptons-nous sans
la moindre hésitation le cours inférieur de l'Ouad-