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264 ETUDES SUR LA KABILIE. *
ar
ment devient considérable; c'est une gêne et quelque
fois un danger. Aussi les Kabiles conservent-ils avec
une sollicitude toute particulière les traditions qui se
rattachent à cette industrie. Quand ils parlent de leurs
villages, un des premiers faits qu'ils mentionnent, c'est
l'existence d'une Torge. Ils savent*le nom de l'artisan
qui l'occupe; s'il est étranger au pays, ils vont vous dire
d'où il est .venu, à quelle époque l'établissement s'est
formé. On ne comprend pas tout d'abord le motif de
l'importance que les Kabiles prêtent à ces détails; et
cependant ce n'est pas sans raison qu'ils leur donnent
une place d'honneur dans leurs souvenirs. L'arrivée
d'un forgeron est un bienfait pour le pays où il vient
se, fixer. Avant la venue de cet artisan, il fallait tra
verser un espace de six à huit lieues pour faire réparer
une faucille, une pioche ou un soc de charrue. Si,
dans ce trajet, on passait au voisinage d'une tribu en
nemie, on courait le risque d'être assassiné ou dévalisé.
* Il a
y
deux ans, disait un Kabile, que nous possédons
un forgeron dans mon village,
trop tard. » — « Pourquoi cela?
et il est venu un an
» lui demandâmes-nous.
- —
«C'est, répondit-il, que Tannée d'avant, mon père,
en allant porter ses outils en réparation au village le
plus voisin,
a été assassiné en route. On cite les ou
vriers étrangers qui , étant venus s'établir dans une con
trée, y ont formé d'autres artisans, et ont doté le pays
d?une industrie nouvelle. Le souvenir traditionnel qu'on
leur conserve est un gage de la satisfaction publique
et de l'intérêt qui s'attache à leur industrie.