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LIVRE I— DENOMINATIONS. 63
Le rapprochement que nous venons d'établir nous
aidera à expliquer la formation du nom collectif et
du nom individuel.
Bien qu'à l'époque dont nous venons de parler, la
France n'eût pas, à beaucoup près, la cohésion qu'elle
a acquise depuis, cependant le nom de Français exis
tait déjà.
L'Afrique, sous ce rapport, est moins avancée; car,
ni dans la régence de Tunis, ni dans la régence d'Alger,
ni dans l'empire de Maroc , il n'existe d'expression pour
caractériser la nationalité générale; les indigènes re
connaissent bien un gouvernement de Tunis ( heukmet
Tounes), un gouvernement d'Alger [heukmet-Dzaïr) et
un gouvernement de Mouleï-'Abd-er-Rah'mân [heuk-
met-Mouleï-Abd-er-Rah'mân);
mais ils n'ont pas de
termes pour exprimer que l'on est sujet d'un de ces
trois états. Un Tounsi est tout simplement un habitant
de Tunis; un Dziri, d'Alger; un Mrâkchi, de Mrakech
ou Maroc. Il est juste de dire qu'ils s'en inquiètent peu,
et n'éprouvent en aucune façon le besoin de se voir
rattachés , par une dénomination générale , à celui des
gouvernements dont ils dépendent : c'est bien assez que
l'obligation d'acquitter l'impôt vienne annuellement
leur rappeler cette dépendance. Et encore peu leur im
porte de savoir à qui ils le payent; le mieux serait de
ne pas le payer du tout; l'important est de ne pas le
payer deux fois : là s'arrête leur souci patriotique.
Nous , au contraire , poussés par l'esprit de généra
lisation politique qui distingue les peuples du Nord et la