1959 - Université Libre de Bruxelles

110 G. A. BRUNET
losophes et des psychiâtres nous révèlent les profondeurs du
subconscient, l'artiste publiera ses rêves ou ce qu'il croit en
être. Puisque les notes ont entre elles des rapports mesurables,
si l'on admet que la gamme est arbitraire on pourra utiliser
des rapports nouveaux dont on dira qu'ils ne sont ni plus ni
moins arbitraires que les intervalles conventionnels et créer
des sensations proprement inouïes. Assurément nos goûts sont
affaire d'habitude dans une certaine mesure, et les habitudes
peuvent changer. Le romantisme a laissé des œuvres admirables
dont l'outrance nous fait parfois sourire mais ne nous
indigne plus. Son succès fut le résultat de ses outrances, mais
ce ne sont pas elles qui lui ont assuré sa pérennité.
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Si la mission de l'art n'était que de surprendre et si
l'étonnement qu'il provoque était une condition nécessaire
de sa valeur, on ne saurait être assez audacieux; mais si,
comme on est en droit de le penser, l'art est destiné à émouvoir
un public, l'artiste qui veut montrer son moi pourrait
s'aviser de ce que son « message» suppose un destinataire.
Ce destinataire a un organisme, des sensations, des réflexes
même et ceci importe.
II arrive que le (( message» ne soit pas supporté et que
le patient ne s'y accoutume pas.
Si un médecin qui prétend exercer un art mais dont la
cervelle est imprégnée de la méthode expérimentale, veut
expliquer à un malade une thérapeutique nouvelle, il est
probable que devant un échec éventuel et en supposant son
diagnostic exact, il pense à changer de thérapeutique parce
qu'il admet pour évident que la nature a toujours raison.
Certains artistes, moins humbles sans doute devant la
nature, pensent que, la drogue étant bonne, la nature' du
patient est mauvaise si elle se défend. Pour annihiler les
réflexes, il utilise ou délègue ses pouvoirs à ses thuriféraires
pour composer une narcose de la composition, suivante:
« Rembrandt est un grand peintre, or X, Y et Z sont les dignes
descendants de Rembrandt. Ils sont donc des grands peintres. »
A ce sophisme très apparent puisqu'il contient une pétition
de principe, on ajoute perfidement: « Si Je patient qui admire