1959 - Université Libre de Bruxelles

SÉANCE SOLENNELLE DE RENTRÉE DU 9 OCTOBRE 1958 15
Si les Sciences continuent d'accroître leur patrimoine propre
de connaissances, chacune dans son domaine, elles décèlent
en m-ême temps une tendance de plus en plus accentuée d'interférer
entre elles aux confins de leurs hinterlands respectifs
et aussi une propension très nette à se raccorder entre elles par
le recours à des techniques et des méthodes analogues. Et ceci
conditionne également, comme on s'en doute, les marges
d'adaptation du haut enseignement, aux contingences scientifiques
nouvelles. Il est sans doute inutile de multiplier les exemples
qui mettent en lumière combien s'émoussent de plus en
plus les frontières entre grandes disciplines ~cientifiques. Dans
l'investigation de la matière et de l'énergie, la physique et la
chimie se confondent dan& les conception~ et dans les techniques;
l'une et l'autre, sut lê terrairi théorique, sont dans une
même dépendance à l'égard du langage mathématique. L'étude
de l"état solid~ relève autant de la responsabilité des chimistes
que de celle des physiciens ou des cristallographes. Dans le
domaine de l'enseignement et de la clinique médicale, des disciplines
telles que la physiologie ne se conçoivent pas sans un
recours substantiel à la physique et à la biochimie. L'évolution
dont il s'agit peut être appréciée dans son étendue et son accélération
en regardant dans le proche passé. Les personnes de
notre génération connaissaient encore des programmes de formation
universitaire rigoureusement compartimentés. Pour ne
citer qu'un cas parmi de nombreux autres, les licenciés et les
docteurs en chimie, il y a quelques décades à peine, étaient
dotés, au départ, d'une formation acquise au cours de leurs
études moyennes, qui en mathématiques était la même que
celle exigée des futurs philologues ou juristes; leur préparation
universitaire en matière de physique n'était guère très différente
de celle réservée aux étudiants en médecine. Pourrait-on
concevoir, à 1 'heure actuelle, un homme de recherche en
chimie qui se satisferait d'un bagage aussi pauvre dans les
sciences avec lesquelles son domaine interfère de toutes part~
Et ceci m'amène à souligner les termes contradictoires de
la fonction d'évolution que nous vivons :
- D'une part, les connaissances dans chaque branche
s'accumulent au point que s'il fallait en tenir compte dans une
formation complète de qualifié dans la spécialité, l'initiation
nécessaire comporterait une durée démesurée, et la masse des