1959 - Université Libre de Bruxelles

L'INSTRUMENT MATHÉMATIQUE EN BIOLOGIE 203
je crois qu'il est possible de donner une formation mathématique en
mêmè temps qu'humaine à tous nos jeunes gens qui se préparent à
l'université.
J'ai récemment, dans une assemblée qui était appelée à se prononcer
sur la nécessité de l'enseignement du grec pour la formation du
juriste, répondu sans hésiter que cela me paraissait inutile dans l'état
actuel de l'enseignement du grec tel qu'il est institué dans nos établissements
d'enseignement moyen car le grec était peut-être utile dès
l'instant où il permettait à celui qui en avait suivi l'enseignement
pendant cinq ans, de lire un texte et d'en comprendre les nuances,
mais que l'enseignement d'une langue morte devient inutile lorsqu'au
bout de trois ou quatre ans pendant lesquels on se consacre à cet enseignement,
on ne parvient pas à lire un texte de cette langue. Et alors,
je me demande si la formule ne serait pas d'essayer de généraliser l'enseignement
latin-sciences qui a été adopté déjà dans notre enseignement
secondaire, dans lequel la formation mathématique peut être poussée
à un degré tel que le bénéfice de cette valeur formative de la mathématique
soit assuré à ceux qui veulent se destiner à d'autres sciences que
celles auxquelles jusqu'à présent la formation mathématique supérieure
permettait d'avoir accès, tout en maintenant un judicieux équilibre avec
l'enseignement des sciences humaines. Mais je crois que j'ai débordé un
peu du cadre et du programme de cette Journée, puisque les organisateurs
de cette Journée n'ont pas pensé, à en juger d'après le programme,
que la formation mathématique pût être utile à d'autres que les biologistes,
en dehors de la formation des physiciens, ou des astronomes
ou des chimistes ou des ingénieurs qui a été prévue dans le programme.
Je vois beaucoup plus loin et je crois qu'on devrait avoir des
ambitions beaucoup plus grandes et que les mathématiciens sont très
timides lorsqu'ils veulent réserver l'enseignement mathématique à ceux
qui seuls se destinent à des disciplines de l'ordre des (( sciences exactes ».
Il faudrait que l'on enseignât la mathématique à beaucoup d'autres personnes
et à tout le monde en quelque sorte. Seulement, je pense que,
comme l'a djt M. Godeau ce matin, c'est surtout le professeur de mathématiques
qui doit se montrer à la hauteur de sa tâche et ce qui fait
que beaucoup d'esprits se rebiffent à l'étude des mathématiques c'est
parce que le professeur a été mauvais. J'ai eu la chance peut-être d'avoir
un bon professeur de mathématiques puisque je me suis tellement attaché
aux mathématiques que j'ai jugé nécessaire, après mes études grécolatines,
de faire le complément: de mathématiques scientifiques pendant
le cours des trois années supérieures de scientifiques. Cet accident
qui m'est arrivé aurait pu arriver à d'autres qui auraient peut-être
eu la chance d'avoir un professeur de mathématiques qui leur aurait
donné le goût des mathématiques et je crois que l'on pourrait peut-être
donner le goût des mathématiques si l'on supprimait beaucoup de choses
inutiles dans l'enseignement des mathématiques et si l'on faisait, comme
M. Godeau le suggérait ce matin, un enseignement qui soit uniquement
tourné vers la formation mathématique sans l'encombrer de beaucoup
de choses qui ne sont peut-être pas nécessaires pour pouvoir progresser
et pour pouvoir bénéficier de la formation mathématique qui, je le
répète, me paraît essentielle pour la formation de l'esprit humain.
M. Janne. - Je crois qu'il est bon que je rappelle en deux mots
le cadre que nous nous sommes fixé. D'une part, nous constatons que
certains types d'hommes actuellement formés par les mathématiques