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1959 - Université Libre de Bruxelles

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316 PIERRE RUELLE<br />

langues romanes à laquelle il s'était voué après avoir, sur les<br />

conseils <strong>de</strong> Goethe, lu l'œuvre <strong>de</strong> Raynouard. La grammaire<br />

historique <strong>de</strong>s langues romanes et, du même coup, celle du<br />

français étaient nées. C'était vers le milieu du XIX 8<br />

siècle, à<br />

l'époque où, en France, le positivisme proposait aux savants<br />

un objectif limité mais précis, la découverte <strong>de</strong> lois, ces « relations<br />

constantes dérivant <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s choses )). La grammaire<br />

historique, ou plutôt la seule phonétique, pouvait donc,<br />

<strong>de</strong> ce côté-ci du Rhin s'épanouir dans un milieu particulièrement<br />

propice. Et <strong>de</strong> fait, les premiers continuateurs français<br />

<strong>de</strong> Diez, épris <strong>de</strong> rigueur formelle, s'attachèrent à ~ettre la<br />

phonétique historique en formules, reconstituant avec soin les<br />

étapes qui, à partir du latin vulgaire, jalonnent la route <strong>de</strong> e<br />

fermé tonique et libre vers le français oi ou <strong>de</strong> t intervocalique<br />

vers le néant. C'était un premier inventaire qui peut<br />

sembler ari<strong>de</strong>, mais qui était indispensable. Il apparut bientôt,<br />

en effet, que les règles trouvées n'étaient pas sans exceptions.<br />

Des mots du français refusaient, pour ainsi dire, <strong>de</strong><br />

se plier aux normes <strong>de</strong> la dérivation phonétique. D'autres<br />

langues, elles aussi, révélaient <strong>de</strong>s formes aberrantes. Allait-il<br />

falloir admettre la faillite, au moins partielle, <strong>de</strong> lois toutes<br />

neuves ~ Des linguistes allemands, Delbrück, Paul, Brugmann<br />

..., que l'on désigne sous le nom <strong>de</strong> néo-grammairiens,<br />

posèrent en principe qu'elles étaient, au contraire, absolues.<br />

Leur point <strong>de</strong> vue fut adopté par <strong>de</strong>s Français comme Gaston<br />

Paris et Paul Meyer.<br />

La théorie <strong>de</strong>s néo-grammairiens a été souvent mal comprise<br />

et parfois déformée dans l'ar<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s polémiques et il<br />

convient <strong>de</strong> l'énoncer dans les termes à la fois précis et pru<strong>de</strong>nts<br />

employés par Wundt dans sa célèbre Volkerpsychologie :<br />

« Un tel postulat (l'absence d'exception aux lois phonétiques)<br />

n'a bien entendu jamais signifié que <strong>de</strong>s lois admises s'exerçaient<br />

dans chaque cas particulier, mais bien que les lois phonétiques,<br />

comme d'ailleurs les lois naturelles, s'exerçaient sans<br />

exception lorsqu'elles n'étaient point annulées par d'autres<br />

ou par <strong>de</strong>s faits singuliers les contrecarrant. Il ne s'agit donc<br />

pas, en l'espèce, <strong>de</strong> l'application sans exception d'une loi mais<br />

d'une conformité sans exception à <strong>de</strong>s lois. On pose en principe<br />

que toute modification historique présuppose une cause,

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