1959 - Université Libre de Bruxelles

EURATOM ET LE PROBLÈME ÉNERGÉTIQUE DE L'EUROPE 95
1. Utilisations pacifiques ou utilisations paCifiques et militaires
de l'énergie atomique?
Après les beaux succès remportés par la G. E. C. A. dès
1953, les tentatives d'unification européenne avaient malheureusement
échoué parce qu'en soulevant le problème de l'intégration
militaire supranationale on avait touché à l'une des
cordes les plus sensibles du nationalisme. Or, il apparut rapidement
que l'atome, personnage à deux visages, pareil au vieux
dieu Janus parce qu'il regarde à la fois vers la paix et vers la
guerre, risquait de .provoquer les mêmes discussions. La question
de l'utilisation de l'énergie atomique à des fins militaires
suscite dans tous les pays européens les passions les plus vives ~
en outre, l'un des futurs partenaires se trouvait sous l'interdiction
de fabriquer des armes A, B, G (atomiques, bactériologiques,
chimiques). Dès le début des négociations, un dilemme
très dangereux allait donc se poser. Ou bien toutes les applications
de l'énergie atomique, y compris les armes, relèveraient
de la Communauté, et l'on serait replongé dans le cycle infernal
des discussions sur la C. E. D. avec la perspective quasi certaine
d'un échec. Ou bien les six pays déclareraient solennellement
renoncer à la fabrication de la bombe atomique; mais cette
attitùde généreuse, facile pour quelques-uns, serait considérée
comme l'équivalent d'un suicide politique par certains grands
pays.
Il fallait donc chercher une autre solution moins nette,
mais plus praticable. C'est ainsi que la compétence des institutions
d'Euratom në s'étend qu'aux utilisations pacifiques de
l'énergie atomique. En matière de défense nationale, la souverainet.é
des Etats membres reste entière.
Voici quelques applications de ce compromis :
Les connaissances acquises par la Communauté grâce à
l'exécution de son programme de recherches, dont la divulgation
est susceptible de puire aux intérêts de la défense d'un
ou de plusieurs Etats membres, sont soumises à un régime de
secret (a.rt. 24).
Le contrôle de sécurité, exercé par les inspecteurs de la
Commission, ne peut s'étendre aux matières destinées aux
besoins de la défense, qu'elles soient en cours de façonnage ou
stockées dans des établissements militaires (art. 84).
En principe, les matières fissiles spéciales sont la propriété