1959 - Université Libre de Bruxelles

334 S. SULZBERGER
considéré com~e le premier inventeur de la peinture à l'huile,
plutôt que pour n'importe quelle qualité intrinsèque». L'auteur
ajoute : « L'art est ici dans son enfance; mais comme ce
tableau offre une fidèle représentation de la nature individuelle,
il ne laisse pas que de plaire » (2).
En 1790, Johann Georg Foerster, compagnon de voyage de
Cook, remarque à Gand « une très vieille peinture des frères
van Eyck qui vaut d'être citée parce qu'elle est peut-être la première
qui ait été peinte à l'huile dans les Pays-Bas» e).
Le seul mérite reconnu à nos vieux maîtres ne résiste pas
à l'examen attentif: l'argument de « l'invention de la peinture
à l'huile» allait faire l'objet d'une réfutation serrée. D'anciens
textes découverts en Angleterre et des analyses chimiques,
tentées à Vienne (1793) sur les panneaux de Tommaso de
Modène, fournissent des arguments aux partisans d'une date
bien antérieure pour la découverte du procédé CL). La polémique
prend immédiatement un ton assez âpre. Les Brugeois
ne reconnaissent à personne le droit de mettre en doute la
gloire de leur génie national; ils s'insurgent contre l'outrecuidance
des Gantois qui, en 1802, ont organisé un concours
ayant pour thème le buste de Jean van Eyck, inventeur de la
peinture à l'huile CS).
Entre-temps, une suite d'événements considérables assure
aux peintures des van Eyck un regain d'intérêt: enlèvement
de la partie centrale du Retable par les troupes révolutionnaires,
son exposition à Paris depuis 1799 CI), retour triom-
(2) J. REYNOLDS, The literary Works. A journey to Flander and Hol·
land (1781), trad., Paris, 1806, t. II, p. 233.
(3) J. G. FOERSTER, Ansichlen VOnt Niederrhein, von Brabant, Flandern,
Holland, England und Frankreich, 'Leipzig, 1768 (trad. franç.
1795) .
(') Mise au point détaillée dans G. WAAGEN, Ober Hubert und
Johann van Eyck, Breslau, 1822, p. 88.
CS) Chr. MECHEL, Catalogue des tableaux de la Galerie impériale de
Vienne, Bâle, 1784, p. VII.
Chevalier DE BURTIN, Traité théorique et pratique des connaissances
qui sont nécessaires à tout amateur de tableaux ... , Bruxelles, 1808, t. 1 er ,
p. 133.
M. PAQUET-SYMPHORIEN, Voyage historique et pittoresque, Paris, 1813,
t. II, p. 127.
(6) Notons pourtant une description enthousiaste de la Madone du
Chancelier Rolin dans FILHOL, Galerie du Musée Napoléon, Paris, 1813,
t. IX, pl. ll.