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i- :1 :4 - - Centre de Recherche en Epistémologie Appliquée

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pat<strong>en</strong>t que dans cette société égalitaire et indiffér<strong>en</strong>ciée, sans hiérar—<br />

c-hie ni spéciaIiti.on professionnelle, le peintre est le type même <strong>de</strong><br />

singularité que notre modèle théorique nous invite à rechercher : alors<br />

que les Tin damas ignor<strong>en</strong>t la division sociale <strong>de</strong> travail et que chacun,<br />

selon son sexe et ses besoins personnels, pèche, fait son jardin, cons<br />

truit sa pirogue, etc., le peintre est le seul à avoir un métier, c’est—<br />

à—dire à vivre exclusivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> sa peinture qu’il v<strong>en</strong>d aux autres villa<br />

geois, le seul aussi à accumuler <strong>de</strong>s surplus (d’ignames, <strong>de</strong> services,<br />

etc.). Comm<strong>en</strong>t expliquer cela ?<br />

La théorie hocarti<strong>en</strong>ne, à laquelle je me suis déjà référé, nous suggère<br />

<strong>de</strong> voir dans le peintre un spécialiste du rituel. Et, bi<strong>en</strong> que l’ethno<br />

graphe <strong>de</strong>s Tin damas répugne à parler à son propos d’activités “magiques”,<br />

“religieuses” ou même “rituelles”, force est bi<strong>en</strong> <strong>de</strong> recourir à l’hypo<br />

thèse et au vocabulaire <strong>de</strong> Hocart. En effet, le peintre, nous dit—on<br />

d’<strong>en</strong>trée <strong>de</strong> jeu, estle”maître <strong>de</strong> l’interprétation orale <strong>de</strong> la tradition”<br />

et si l’on examine <strong>en</strong>suite comm<strong>en</strong>t on <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t peintre, qui achète et<br />

pourquoi la peinture, et comm<strong>en</strong>t on apprécie les oeuvres, aucun doute<br />

n’est permis : le peintre est le personnage c<strong>en</strong>tral <strong>de</strong> tous les grands<br />

rituels qui scan<strong>de</strong>nt la vie collective <strong>de</strong>s adultes (99).<br />

On <strong>de</strong>vi<strong>en</strong>t peintre <strong>en</strong> fréqu<strong>en</strong>tant une “école <strong>de</strong> peinture”, c’est—à—<br />

dire “l’atelier” d’un peintre confirmé. Ces écoles attir<strong>en</strong>t <strong>de</strong> nombreux<br />

jeunes g<strong>en</strong>s, mais la sélection est très sévère. L’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t est <strong>en</strong><br />

tièrem<strong>en</strong>t sil<strong>en</strong>cieux car un peintre qui parlerait est c<strong>en</strong>sé perdre son<br />

aptitu<strong>de</strong> à peindre. Le maître <strong>en</strong>seigne <strong>en</strong> décomposant les gestes <strong>de</strong>vant<br />

les élèves. Ceux—ci ne regar<strong>de</strong>nt pas l’oeuvre, mais le corps du maître,<br />

et ils acquièr<strong>en</strong>t une technique <strong>de</strong> maîtrise du corps : respiration,<br />

gestes, etc. Il arrive qu’<strong>en</strong> suivant les gestes du maître, un élève <strong>en</strong><br />

tre <strong>en</strong> transes, tombe dans un état cataleptique, ce qui est interprété<br />

comme un signe favorable pour la suite <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s — on pourrait dire<br />

<strong>de</strong> son parcours initiatique. La fin <strong>de</strong> l’<strong>en</strong>seignem<strong>en</strong>t est tout aussi<br />

ritualisée: elle est marquée par une séparation brutale du maître et du<br />

disciple. Le maître se plaint avec véhém<strong>en</strong>ce d’avoir <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dré un rival

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