Noi culturi, noi antropologii - Humanitas

„Les villages qui ont une population ukrainienne sont assez typés.
Ici, les fermes [gospodării] donnent l’impression d’improvisation et
de quelque chose d’instable – de quelque chose de fait pour une
courte période – au contraire de celles des populations roumaines
qui ont une assise éternelle de leur établissements.
Ces quelques extraits ne peuvent que nous rapprocher,
comme nous y incite la lecture de Detienne, de l’analyse des
discours patriotiques français portés par une certaine droite
(voire extrême-droite), lors des deux „grandes guerres“ et
de la période interbellique qui les sépare.
Immigrés versus roumains „de souche“
(Neamuri emigrate versus bǎştinaşi)
Comme on vient de le voir à travers ces quelques passages
choisis, la rhétorique de l’Enciclopedia României se
déploie autour d’une opposition fondamentale qui stigmatise
„l’étranger“ face au „raciné“, pour reprendre, ici encore, le
terme de Maurice Barrès 362 . En cela, c’est bien une publication
porte-parole d’un nationalisme caractéristique de cette
période de la Grande Roumanie, dont la tâche est de faire
ressortir, sous un commun dénominateur, la nation roumaine,
une et unie contre la menace des „autres“, dans le
partage de valeurs communes telles, notamment celle de la
religion orthodoxe 363 .
Ainsi, l’histoire de la région nous enseigne, à travers
de tels discours, que, dès son annexion à la „Grande Roumanie“,
la „multi-ethnicité“ de la Bucovine ne pouvait plus
trouver sa „juste place“ dans les formations politiques qui
ont redessiné la carte de l’Europe lors des grands Traités
de 1918-19 (Versailles, Saint-Germain etc). Les tentatives
Suceava, au reuşit (sic!) să elimine complet evreii din mijlocul lor.
362. Voir le chapitre Le raciné, né de ses morts in Detienne, op. cit.
p. 55.
363. Voir par exemple la conception de N. Crainic, selon laquelle
ethnicité et orthodoxie sont inséparables. (Voir Crainic, N., „Politică şi
ortodoxie“, Gândirea, 3, 5(123), cité in Hitchins).
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