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Université Paul Verlaine-Metz U.F.R Sciences Humaines et Arts ...

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mêmes, avant de côtoyer les anges, avaient été proches des djinn. Or, le premier pôle de la<br />

pratique s’avère être celui qui est le plus signifiant aux yeux de l’observateur. Pour coller à la<br />

réalité, le mythe doit être r<strong>et</strong>ourné. Car, que dire sinon de la baraka ?<br />

L’être le plus à la marge que nous avons été amenés à rencontrer est notre informateur<br />

d’origine touareg, Mohamed le Charlatan. Peut-être est-ce le moment de lui rendre justice <strong>et</strong><br />

d’avouer qu’il est celui qui nous a laissé le plus perplexe. Car il vient m<strong>et</strong>tre en doute nos<br />

analyses en même temps qu’il est le seul – hormis Zidiya – à avoir effectué devant nous des<br />

actes spectaculaires. Or, Mohamed le Charlatan, si on en croit les paroles de Rabah, est un<br />

marabout hors-pair. Car, à l’instar de Rabah, il est allé contre le maktūb. Et il semble, après<br />

toutes ces analyses, qu’aller contre le destin est la réelle source du don que possède nos<br />

informateurs. Tous ont en commun d’avoir choisi de ne pas se soum<strong>et</strong>tre à une vie qui devait<br />

être la leur. En ce sens, ils ont tous fait preuve de courage, tous fait preuve de baraka. Mais<br />

pour en arriver là, d’abord fallait-il connaître le rôle des djinn. Connaître leur pouvoir de<br />

nuisance qui n’est en fait que la métaphore des menaces que l’individu fait peser sur son<br />

environnement lorsqu’il refuse d’évoluer dans un système de don. Alors, pour répondre à<br />

c<strong>et</strong>te menace, la communauté combat le mal par le mal : elle trouve du don chez l’individu<br />

même qui refuse l’échange ou qui ne peut assumer l’échange. Rabah nous dit : « d’abord les<br />

djinn, ensuite la liberté ». Et Rabah a raison. Car il conçoit le fait qu’une fois l’élection<br />

survenue, une fois le premier contact crée entre les djinn <strong>et</strong> l’individu, celui-ci pourra à tout<br />

moment les invoquer pour prendre le pouvoir sur son environnement. Les djinn sont de<br />

précieux alliés car il représentent tous les déterminismes qui pèsent sur l’individu. C’est pour<br />

cela que, dans toutes les traditions, les individus qui transgressent sont repris à l’ordre par ces<br />

êtres. Cependant, le marabout-mabrūk a la particularité de s’être interrogé sur ces<br />

déterminismes du fait même qu’il a eu à traverser l’épreuve de l’élection. Ces interrogations,<br />

que lui seul est en mesure d’opérer, lui ont permit de rendre l’invisible visible. Lui perm<strong>et</strong>tent,<br />

comme nous le dit Rabah, de parcourir son chemin en usant des djinn <strong>et</strong> non plus en les<br />

subissant.<br />

C<strong>et</strong>te caractéristique du maraboutisme tunisien n’est pas si différente des observations qu’a<br />

effectuées Bertrand Hell au Maroc. C<strong>et</strong> auteur observe : « c<strong>et</strong>te logique du rapport à<br />

l’invisible ouvre un espace très singulier au sein de la configuration du magico-religieux<br />

prévalant au Maroc. L’idée de s’allier avec les entités surnaturelles, de négocier <strong>et</strong> de leur<br />

plaire en les divertissant contraste n<strong>et</strong>tement avec la conception transcendante <strong>et</strong><br />

assuj<strong>et</strong>tissante du sacré que prône l’Islam. L’image des génies pouvant être cajolés, séduits,<br />

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