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Fin des rituels coutumiers avec <strong>la</strong> terreLes re<strong>la</strong>tions qu’entretiennent les habitants de San Martín avec leurs terres sont définies pardes contraintes utilitaires de subsistance. Mais <strong>la</strong> terre doit aussi être nourrie par des offrandesoffertes au cours de rituels. Q’chu Tx’otx’, se traduit du mam par <strong>la</strong> « terre », mais signifielittéralement, <strong>la</strong> terre mère, <strong>la</strong> grand-mère terre. La terre inspire le respect car elle est sacrée.Comme une mère, on ne peut pas seulement prendre d’elle le maïs, les légumes ou <strong>la</strong> broza, ilfaut également l’alimenter. Et ce<strong>la</strong>, tant avec de l’engrais qu’avec des rites d’offrandes, carelle est autant une ressource économique et alimentaire qu’un être spirituel. En échange desdenrées reçues, il est nécessaire de remercier <strong>la</strong> terre par des prières, tout comme lui demanderpardon pour l’offense qui lui est faite de l’éventrer pour y semer. Contrairement auxchamanes, rares sont les agriculteurs qui pratiquent encore ces rituels sur leurs terres, souventsituées pour partie sur les f<strong>la</strong>ncs de montagnes. « On ne fait plus autant de cérémonies »,explique Otto même si, « certains le font encore ». De retour du champ avec Marvin, nousdiscutons des prières qu’ils accomplissaient dans le passé avant de semer.Je demande à Marvin si avant de récolter ou de semer, ils exécutent un certain rituel avec safamille. Il me répond qu’ils ont fait ces rituels l'année passée, et les années précédentes.Maintenant ils ne le font plus, ils ne connaissent plus les prières. Avant, explique-t-il, un onclede sa maman, un prénommé Juan, venait réciter les prières sur leur champ. Catalina semblevouloir échapper à <strong>la</strong> discussion. Elle avance rapidement que Juan est mort. Je découvriraiplus tard que Juan est encore vivant mais qu’étant devenu profondément alcoolique, il se seraiteffacé socialement. Mais, précise-t-elle, « chacun peut faire ses prières au champ, il ne fautpas avoir <strong>la</strong> présence de quelqu'un en particulier. Avant, quand on al<strong>la</strong>it chercher du bois ouavant de récolter le maïs, on faisait une prière à Dieu, maintenant on ne le fait plus » (Notes deterrain, 30/01/2008).À défaut d’être propriétaire de parcelles à cultiver, le jeune Pascual est contraint de travaillersur les terres d’autres tinecos pour se nourrir. Il a, dès lors, pu observer les diverses façons dese mettre en lien avec <strong>la</strong> terre lors des pratiques agricoles. Au cours d’une discussion, ilexplique avoir encore pu regarder des aînés adresser leurs prières aux champs ou demanderpardon avant de couper un arbre. Il n’aurait cependant plus vu aucun jeune tineco s’adonner àces pratiques. Les aînés et les ancêtres des tinecos récitaient des prières avant d’aller semerafin de « s’assurer qu’abondent les arbres et <strong>la</strong> production agricole » (Otto, MAG,20/07/2008). S’ils adressaient leurs prières à Dieu, c’est également aux éléments d’une natureanimée d’intériorité qu’ils dirigeaient leurs prières. Ces rites permettaient par exemple que« l’air ne vienne pas mettre à terre le maïs et le blé » (Miguel, MAG, 20/07/2008).Les prières et les cérémonies mayas (à l’intention de <strong>la</strong> terre, de <strong>la</strong> pluie, de l’air, du vent,d’une montagne ou d’un arbre qui va être coupé) étaient réalisées par les chamanes commepar les aînés. Pour Miguel, les prières effectuées par ses ancêtres étaient d’une telle qualitéqu’elles permettaient d’éviter l’usage de produit chimique. La rareté et <strong>la</strong> « faible qualité »des rituels coutumiers contemporains ne permettraient plus de contourner les intrantschimiques. Les aïeuls de Miguel présageaient qu’à leur mort, les rituels mayas ne seraientplus poursuivis. Et Miguel de déplorer <strong>la</strong> disparition de traditions qu’il avait vues quand ilétait petit enfant.241

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