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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 142<br />

idea 1 ? De cent réponses possibles, le professeur considère qu’une seule est la<br />

bonne, celle dont il impose non seulement le sens, mais la forme. C’est<br />

déclarer ouvertement la guerre <strong>au</strong> bon sens. On ne peut pas, sérieusement, en<br />

plein XVIII e <strong>siècle</strong>, appeler maître ès arts un homme qui ne sait que la<br />

grammaire latine et les règles du syllogisme in baroco. S’il est vrai que la<br />

somme <strong>des</strong> lumières a <strong>au</strong>gmenté depuis deux cents ans, et que « nous nous<br />

sommes éclairés <strong>au</strong>-delà <strong>des</strong> espoirs et <strong>des</strong> imaginations <strong>des</strong> époques précédentes<br />

2 », il est vrai <strong>au</strong>ssi que nous devons bouleverser la routine <strong>des</strong><br />

collèges, <strong>des</strong> Académies, <strong>des</strong> Universités. Ce raisonnement prend tous les<br />

jours plus de force et aboutit à quelques exigences positives.<br />

Il f<strong>au</strong>t que la substance de l’enseignement soit changée. Mettons -nous<br />

bien dans l’esprit que les matières à étudier ont été choisies quand elles<br />

n’intéressaient que les futurs clercs ; elles se sont étendues, telles quelles, à<br />

ceux qui devaient entrer dans le professorat, lequel se confondait avec la<br />

cléricature : <strong>au</strong>jourd’hui ce public -là n’est plus qu’une minorité. Elles se sont<br />

conservées pour une bonne part à l’usage <strong>des</strong> futurs gentilshommes, riches et<br />

oisifs ; l’humanité ne comporte -t-elle pas d’<strong>au</strong>tres c lasses ? Même les enfants<br />

de noblesse et de h<strong>au</strong>te bourgeoisie, <strong>au</strong>jourd’hui, devraient apprendre un<br />

métier : cela les mettrait à l’abri de bien <strong>des</strong> vices, de l’orgueil, de la paresse,<br />

de la dissipation. En tout cas, la grande majorité <strong>des</strong> hommes est obligée de<br />

gagner son pain ; que dès sa p.195 jeunesse, elle se tourne vers ce que Joseph<br />

Priestley appelle le business of active life 3.<br />

Dès lors, on réduira considérablement la part du latin : à quoi sert, dans<br />

l’existence, d’être un bon latiniste ? Peut-être ne f<strong>au</strong>t-il pas supprimer<br />

entièrement cette discipline, bien qu’en fait le goût du latin se perde. Si on la<br />

garde, qu’on trouve <strong>au</strong> moins <strong>des</strong> métho<strong>des</strong> plus expéditives, qu’on ne perde<br />

plus sept années qui, pour la plupart <strong>des</strong> enfants, ne représentent que peines et<br />

que souffrances, à apprendre une langue morte ! Le temps ainsi gagné, on le<br />

consacrera be<strong>au</strong>coup plus avantageusement à la langue du pays où l’on vit.<br />

L’histoire <strong>au</strong>ssi demande sa place, et moins l’histoire ancienne que l’histoire<br />

politique de l’Europ e, qu’ignorent, quand ils arrivent <strong>au</strong>x affaires, ceux qui<br />

<strong>au</strong>ront à s’occuper du gouvernement. L’étude de l’histoire entraînera celle de<br />

la géographie. Bien entendu, on ne s<strong>au</strong>rait négliger les sciences, et surtout les<br />

sciences naturelles à côté <strong>des</strong> mathématiques et de la physique. Sur les<br />

langues étrangères, on montre plus d’hésitation. Certains conseillent<br />

d’introduire la morale naturelle, en commençant par Grotius et par Pufendorf ;<br />

1 J.-P. de Crousaz, Traité de l’éducation <strong>des</strong> enfants, <strong>La</strong>usanne, 1722.<br />

2 Un âge « enlighten’d beyond the hopes and imaginations of former times ». Dans William<br />

Worthington, An Essay on the Scheme and Conduct, Procedure and Extent of Man’s<br />

Redemption, 1743.<br />

3 Joseph Priestley, An Essay on a course of liberal educatian, or civil and active life.<br />

Composé antérieurement, publié pour la première fois en 1764. Grimm, Correspondance<br />

littéraire, mai 1762. OEuvres, t. V, p. 81.

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