17.08.2013 Views

La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 59<br />

d’ailleurs plus de faiblesse que de force de l’esprit. On ne par lerait, on<br />

n’écrir ait pas contre elle, si on ne la redoutait intérieurement. <strong>Les</strong> prosateurs,<br />

les poètes qui en font l’objet de leurs satires, ressemblent à ces voyageurs<br />

tremblants qui ont peur <strong>des</strong> voleurs et qui chantent de toutes leurs forces pour<br />

cacher leurs craintes. »<br />

Ceux qui formaient l’armée <strong>des</strong> anti -philosophes pensaient qu’on avait<br />

imprudemment porté l’incendie dans la vieille maison, sous prétexte d’y<br />

donner la lumière.<br />

Si nous voulions reprendre une imagination qui fut alors à la mode, et<br />

décrire une bataille de livres, toutes pages tourbillonnant dans les airs, tous<br />

formats s’entrechoquant, nous <strong>au</strong>rions be<strong>au</strong> jeu, car ce fut à peine une figure.<br />

Jamais <strong>au</strong>tant d’ouvrages ne furent publiés contre la religion, jamais <strong>au</strong>tant<br />

d’ouvrages ne furent publiés pour elle. On en <strong>au</strong>rait fait, disaient les<br />

contemporains, <strong>des</strong> bibliothèques entières ; dans les journ<strong>au</strong>x du temps, en<br />

quelque pays d’Europe qu’ils parussent, une seule catégorie fut plus<br />

largement représentée que celle <strong>des</strong> traités agressifs : celle <strong>des</strong> traités qui<br />

défendaient le Christianisme.<br />

<strong>Les</strong> Anciens que les <strong>au</strong>tres invoquaient en faveur du matérialisme, les<br />

apologistes les réfutaient. Et comme les <strong>au</strong>tres appelaient à leur secours tous<br />

les libertins du monde : de même, les apologistes invoquaient les illustres<br />

défenseurs de la foi ; ils ranimaient la grande voix de Bossuet pour rappeler<br />

les âmes vers le Seigneur. On attaquait la Bible ? Dom Calmet passait sa vie à<br />

la défendre. On disait que le Pentateuque n’était pas de Moïse ? Il est bien<br />

vrai, répondait Astruc le médecin, que le livre semble révéler <strong>des</strong> sources<br />

différentes ; qu’on y trouve une tradition d’après laquelle Dieu est nommé<br />

Eloïm, une <strong>au</strong>tre d’après laquelle il est nommé Jéhovah ; et d’<strong>au</strong>tres encore, si<br />

l’on veut ; mais les difficultés disparaissent, si on admet que p.84 Moïse a<br />

travaillé sur plusieurs mémoires qui ont pour ainsi dire convergé vers lui. Un<br />

<strong>des</strong> arguments favoris <strong>des</strong> contradicteurs consistait à prétendre que les valeurs<br />

spirituelles que l’on reconnaissait dans la tradition juive venaient de<br />

l’influence d’<strong>au</strong>tres religions orientales ; on montrerait donc, à rebours, que<br />

les gran<strong>des</strong> fables, les cultes et les mystères du paganisme, ne sont que <strong>des</strong><br />

copies altérées <strong>des</strong> histoires, <strong>des</strong> usages, et <strong>des</strong> traditions <strong>des</strong> Hébreux. Des<br />

critiques infirmaient l’histoire du premier établissement de l’Église, de toute<br />

la tradition ecclésiastique : alors on sortait l’ Histoire ecclésiastique de l’abbé<br />

Fleury, dont Alfieri racontait qu’il avait lu les trente -six volumes, dans sa<br />

jeunesse ; et chez les Luthériens paraissaient les Institutionum Historiae<br />

ecclesiasticae antiquioris et recentioris Libri IV (1726), oeuvre magistrale de<br />

J. L. von Mosheim, l’adversaire de Toland. Dans les collections d’ouvrages<br />

hérétiques les philosophes puisaient leurs négations : donc on publierait<br />

d’<strong>au</strong>tres collections, d’<strong>au</strong>tres choix où les croyants trouveraient à fortifier<br />

leurs certitu<strong>des</strong> et, par exemple, l’ouvrage de Johann Albert Fabricius,

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!