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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 289<br />

CHAPITRE X<br />

<strong>Les</strong> déismes : Voltaire.<br />

p.391 S’il n’avait pas existé, le <strong>siècle</strong> <strong>au</strong>rait -il eu le même caractère ?<br />

Il a mis sur le déisme sa marque ineffaçable. C’est lui qui l’a refaçonné ;<br />

ou si l’on veut une <strong>au</strong>tre métaphore, c’est lui qui a filtré le breuvage ; et quand<br />

son travail a été fini, restait seulement une pure liqueur cristalline. Qu’on<br />

relise, pour faire l’épreuve, le livre qui fut l’un <strong>des</strong> manuels du déisme<br />

anglais, Religion of nature delineated, de Wollaston ; publié pour la première<br />

fois en 1722, l’ouvrage a fait fortune dans son texte original et dans ses<br />

traductions. Comparé <strong>au</strong>x comprimés voltairiens, il paraît n’être que verbiage<br />

et que fatras. Au lieu de ses longues dissertations, voici qu’apparaissent<br />

quelques raisonnements rapi<strong>des</strong>, quelques formules agiles, simples <strong>au</strong> point<br />

qu’un enfant même pourrait les retenir ; voici <strong>des</strong> arrêts impérieux qui<br />

prennent force de loi.<br />

C’est lui qui a insisté sur l’argument <strong>des</strong> c<strong>au</strong>ses finales ; c’est par lui que<br />

l’homme fut reconnaissant à l’Être suprême qui ne s’était pas contenté de l e<br />

mettre à sa juste place, mais qui lui avait donné le plaisir :<br />

Mortels, venez à lui, mais par reconnaissance ;<br />

<strong>La</strong> nature, attentive à remplir nos désirs,<br />

Vous appelle à ce Dieu par la voix <strong>des</strong> plaisirs.<br />

Nul encor n’a chanté sa bonté tout entière :<br />

Par le seul mouvement il conduit la matière :<br />

Mais c’est par le plaisir qu’il conduit les humains 1.<br />

C’est lui qui a précisé les refus : croyons en Dieu, mais refusons de parler<br />

de sa nature, refusons de parler du mode p.392 de ses opérations. Un grillon, se<br />

trouvant en présence d’un palais impérial, reconnaît que l’édifice est dû à<br />

quelqu’un de plus puissant que les grillons ; pourtant il n’est pas si fou que de<br />

se prononcer <strong>au</strong> sujet de ce quelqu’un 2 : imitons cette sagesse.<br />

Soit qu’un être inconnu, par lu i seul existant<br />

Ait tiré depuis peu l’univers du néant ;<br />

Soit qu’il ait arrangé la matière éternelle,<br />

Qu’elle nage en son sein, ou qu’il règne loin d’elle ;<br />

Que l’âme, ce flambe<strong>au</strong> si souvent ténébreux,<br />

1 Cinquième Discours sur l’Homme, 1739.<br />

2 Voltaire, Catéchisme chinois. Dans le Dictionnaire philosophique, 1764.

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