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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 257<br />

celles du monde moral, dans un mouvement continuel de variations<br />

successives 1. »<br />

Marquons ici l’origine d’u n <strong>des</strong> thèmes qui deviendront chers à la poésie<br />

romantique. Projetons dans l’éther ces mouve ments <strong>des</strong> forces naturelles : et<br />

nous <strong>au</strong>rons les visions lamartiniennes. Imaginons la grande échelle <strong>des</strong> êtres,<br />

allant depuis le plus infime objet de la création jusqu’à Dieu ; suivons les<br />

évolutions et les métempsycoses ; et nous <strong>au</strong>rons, de même, les visions qui<br />

hantent la philosophie de Victor Hugo.<br />

p.349 L’attitude de révolte poétique qui fut celle de Ugo Foscolo, de<br />

Wordsworth et de Coleridge à leurs débuts, de Keats par moments, de Byron<br />

toujours, vient d’<strong>au</strong>tres c<strong>au</strong>ses, mais <strong>au</strong>ssi de la <strong>pensée</strong> du XVII Ie <strong>siècle</strong>.<br />

Libertà va cercando, ch’è si cara, porte en épigraphe le roman Ultime<br />

lettere di Jacopo Ortis : il va cherchant la liberté, la liberté chérie. De cette<br />

même liberté, les prédécesseurs de Jacopo Ortis, ses contemporains, ses<br />

successeurs sont tous épris. Le rationalisme a voulu ne considérer dans l’être<br />

humain que les valeurs universelles dont il était le représentant ; mais le<br />

soustrayant à l’<strong>au</strong>torité, à l a tradition, à la règle venue de l’extérieur, il l’a<br />

déchaîné. L’être humain devenait, sans avoir besoin d’<strong>au</strong>tre inspiration que<br />

celle qui lui venait de lui-même, le maître de ses actions ; il n’avait à répondre<br />

d’elles que devant son propre tribunal. <strong>La</strong> l iberté première entraînait toutes les<br />

<strong>au</strong>tres. Il y a plus de logique qu’on ne croirait d’abord dans ce propos de<br />

l’abbé Raynal : « Si vous portez la main sur moi, je me tue, disait Clarisse à<br />

Lovelace ; et moi je dirais à celui qui attenterait à ma liberté : si vous<br />

approchez, je vous poignarde ; et je raisonnerais mieux que Clarisse 2. » —<br />

L’individu est libre ; la <strong>pensée</strong> est libre ; la passion est libre ; l’expression<br />

littéraire est libre : c’est par un abus que nous nous obstinons à chercher une<br />

<strong>au</strong>torité, à suivre <strong>des</strong> modèles chez nos pères grands ; osons nous représenter<br />

tels que nous sommes. — Ce n’est plus un paradoxe d’affirmer que s’il y a eu<br />

un romantisme qui a trouvé ses attaches dans un passé lointain, qui a été, en<br />

matière de religion, théocratique ; en matière de politique, conservateur ; et<br />

qui, en conséquence, a répudié l’héritage <strong>des</strong> lumières, il y a eu, <strong>au</strong>ssi, un<br />

romantisme libéral, et même libertaire : celui de Shelley ; celui de Stendhal.<br />

Enregistrons ces données ; puis assistons à un <strong>au</strong>tre travail ; celui de la<br />

psychologie qui s’applique à découvrir, <strong>au</strong> prix d’un effort prolongé,<br />

l’existence d’une force non rationnelle, qui permet de percevoir le be<strong>au</strong> et<br />

même de le créer.<br />

p.350 Qu’est -ce que le be<strong>au</strong> ? Encore un problème, d’<strong>au</strong>tant plus di fficile à<br />

résoudre qu’<strong>au</strong>x psychologues, <strong>au</strong>x logiciens, <strong>au</strong>x métaphysiciens obstinés<br />

1 Buffon, <strong>Les</strong> Époques de la nature, 1774.<br />

2 Histoire phil. et politique <strong>des</strong> établissements et du commerce <strong>des</strong> Européens dans les deux<br />

In<strong>des</strong>, 1770. Livre XI.

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