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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 56<br />

CHAPITRE VI<br />

L’apologétique<br />

p.79 Partout où le Christianisme avait partie liée avec l’État, l’État venait à<br />

son secours. En Espagne, la publication et même la diffusion <strong>des</strong> oeuvres<br />

impies était particulièrement difficile ; à côté, voire <strong>au</strong>-<strong>des</strong>sus du pouvoir<br />

royal, veillait l’Inquisition. De même <strong>au</strong> Portugal : le 18 octobre<br />

1738, Antonio Jose da Silva est étranglé, puis brûlé dans un <strong>au</strong>to da fe à<br />

Lisbonne ; en 1778 encore, Francisco Manoel do Nascimiento, accusé de ne<br />

pas croire <strong>au</strong> Déluge, de jeter le ridicule sur la doctrine du péché originel, est<br />

emprisonné ; il n’échappe a son procès qu’en s’évadant. En France, où toute<br />

attaque contre le droit divin était un crime de lèse-majesté, la censure, le<br />

privilège <strong>des</strong> libraires, les condamnations prononcées par les évêques et par<br />

l’Assemblée du clergé, les interventions du Parlement, les sanctions royales,<br />

essayaient d’endiguer le flot montant de l’incroya nce. Dans l’Italie morcelée,<br />

les cas étaient variables : la Toscane était indulgente et laissait réimprimer<br />

chez elle l’ Encyclopédie ; le grand-duché de Parme, francisé, montrait peu de<br />

rigueur ; à Venise, ville du commerce, on fermait volontiers les yeux sur la<br />

nature de la marchandise tandis que Rome était sévère, et que le Piémont<br />

prenait <strong>des</strong> mesures tracassières ou violentes. En Autriche, Marie-Thérèse<br />

était particulièrement soupçonneuse : à Vienne, la censure fit interdire le<br />

Catalogue de l’Index, par ce que la seule lecture <strong>des</strong> titres <strong>au</strong>rait pu donner la<br />

curiosité de lire les ouvrages dont il valait mieux, pensait-elle, que l’existence<br />

même demeurât insoupçonnée. A mesure que la propagande philosophique<br />

devenait plus active, s’accentuait la rigueur. In terdictions, prohibitions,<br />

s’aggravaient, dans les pays p.80 mêmes où, <strong>au</strong> début du <strong>siècle</strong>, on avait fermé<br />

les yeux.<br />

Chez les protestants, il était entendu que la <strong>pensée</strong> avait le droit de<br />

s’exprimer librement. Ce qui n’empêchait pas qu’en Allemagne on expu lsât<br />

Wolff de sa chaire de Halle et <strong>des</strong> États prussiens, qu’on persécutât Edelmann,<br />

qu’on empri sonnât Johann Lorenz Schmidt, qu’on chassât Karl Friedrich<br />

Bahrdt de ses emplois. Berlin était en principe la plus tolérante de toutes les<br />

villes, accueillante <strong>au</strong>x proscrits qui étaient traqués ailleurs pour c<strong>au</strong>se<br />

d’irréligion ; mais dès qu’il s’agissait de politique, c’était une <strong>au</strong>tre affaire, si<br />

nous en croyons un témoin non suspect, <strong>Les</strong>sing : à Berlin, dites en matière de<br />

foi toutes les sottises que vous voudrez, on vous laissera tranquille ; mais<br />

avisez-vous d’aborder la politique et vous verrez que cette prétendue liberté<br />

est un esclavage. Même en Angleterre, on sévissait quelquefois ; jusqu’en<br />

1779, les catholiques continuaient à être exclus de l’Acte de To lérance.

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