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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 67<br />

marchandises de contrebande qu’on avait introduites dans le temple. Feijoo se<br />

sentait parfaitement à l’aise à la fois dans la tradition et dans la nouve<strong>au</strong>té.<br />

Intégrer la nouve<strong>au</strong>té dans la tradition ; débarrasser l’ensei gnement <strong>des</strong><br />

vieilleries de l’école ; orienter les esprits vers l’observation <strong>des</strong> faits ;<br />

préconiser le culte de Bacon, de p.94 Newton ; délivrer les Portugais de leur<br />

narcissisme ; les habituer à la critique, <strong>au</strong> jugement personnel ; les réveiller,<br />

les exciter à reprendre place dans la vie intellectuelle de l’Europe : ce fut une<br />

grande tâche ; ce fut celle de l’<strong>au</strong>teu r du Verdadeiro Método de Ertudar<br />

(1746-1747), le P. Luis Antonio Verney, franciscain ; et ses successeurs furent<br />

encore <strong>des</strong> ecclésiastiques, <strong>des</strong> Oratoriens.<br />

Si l’on voulait faire ressortir la figure la plus représentative peut -être de ce<br />

catholicisme éclairé, il f<strong>au</strong>drait choisir un prêtre, Antonio Genovesi. Il le<br />

mérite par la fermeté de sa position initiale, qui est celle-ci : les penseurs qui<br />

attaquent la religion chrétienne la connaissent mal, et dès lors la déforment :<br />

pour les réfuter il est nécessaire que se présente un homme qui la connaisse de<br />

l’intérieur, qui la pratique fermement, et qui en dégage l’esprit. Dès lors il se<br />

met à l’oeuvre. Tous ceux qui ont pris parti contre la religion révélée, il les a<br />

pratiqués, il les cite <strong>au</strong> besoin, ses pages sont pleines de leur souvenir ; tous<br />

les apologistes, il les a lus de même ; tous les problèmes que l’époque s’est<br />

plu à poser et à reprendre, il les a abordés pour son compte, franchement,<br />

l’origine <strong>des</strong> idées, la loi natu relle, le rationalisme et l’empiri sme,<br />

l’optimisme. Il défend la doctrine chrétienne par la connaissance profonde<br />

qu’il a de ses ennemis, et d’elle -même ; et il la défend encore par son action.<br />

Il avait été péripatéticien dans sa jeunesse, bon disputeur pro et contra.<br />

Ordonné en 1736, il était arrivé à Naples l’année suivante ; c’était le temps où<br />

Mgr Galiani entreprenait la réforme <strong>des</strong> étu<strong>des</strong> : il entra dans le parti <strong>des</strong><br />

réformateurs. Il fut cartésien ; puis il connut la <strong>pensée</strong> de Locke et pour une<br />

part il l’accepta. Professeur de métaphys ique, puis d’éthique à l’Université, il<br />

publia, à partir de 1743, <strong>des</strong> Elementa Metaphysicae qui firent époque ; et il<br />

ne cessa plus d’employer le moyen le plus sûr parmi ceux qui influent sur la<br />

vie : atteindre l’âme <strong>des</strong> jeunes gens. A ses étudiants il ré pète qu’il ne f<strong>au</strong>t pas<br />

jurer sur les paroles <strong>des</strong> maîtres ; que la croyance doit procéder d’un examen<br />

rationnel ; qu’elle ne doit pas être confondue avec la bigoterie, qui ne fait<br />

qu’étouffer la flamme intérieure ; que le catholicisme ne craint pas d’affron ter<br />

la philosophie moderne, soit pour la réfuter lorsqu’elle se trompe, soit pour<br />

tirer parti d’elle lorsqu’elle est conforme à la sagesse. p.95 Tout recommence,<br />

mais sur un mode plus vif, en matière de politique, car Genovesi contribue à<br />

un déplacement d’ intérêt qui est capital pour Naples et pour l’Europe : il<br />

s’agit moins de légitimer la raison d’État, de remonter <strong>au</strong>x origines théo -<br />

cratiques du gouvernement civil, de consolider la structure du pouvoir établi,<br />

que d’affirmer le droit <strong>des</strong> sujets, que de de mander les réformes qui doivent<br />

assurer leur bonheur. Sur la terre napolitaine, où la féodalité pesait<br />

lourdement, une manière d’accord se produit entre le prince et les sujets,<br />

contre la puissance intermédiaire qui est hostile <strong>au</strong>x intérêts de l’un et le

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