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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 325<br />

mineurs de Newcastle, ou les tisseurs de Bristol, ou les miséreux de Londres,<br />

ou, de ville en ville et de village en village, tous ceux qui avaient perdu la foi<br />

dans le S<strong>au</strong>veur ; du fond de leur détresse, il leur rendait l’espoir <strong>des</strong><br />

résurrections, <strong>au</strong> nom du Christ ; croisade parmi les humbles, dont le résultat<br />

était que l’Angleterre retrouvait, par le méthodisme, ses assises morales.<br />

Ainsi nous commençons à voir, après les forces convergentes, les forces<br />

divergentes qui s’opposent à l’unité de la conscience <strong>européenne</strong>. En voici<br />

d’<strong>au</strong>tres.<br />

Assurément, c’est <strong>au</strong> XI X e <strong>siècle</strong> que le principe <strong>des</strong> nationalités se<br />

proclame, que les nationalismes s’affirment : mais ils se préparent <strong>au</strong> <strong>siècle</strong><br />

précédent. Qu’il est profond, qu’il est vigoureux le sentiment obscur qui a<br />

précédé l’idée ! Comme il est habile à discerner, dans les influences<br />

étrangères, les éléments qui lui sont utiles et qu’il gardera, <strong>des</strong> éléments non<br />

spécifiques dont il s<strong>au</strong>ra se débarrasser ! On dirait que chaque pays est un<br />

organisme qui persiste dans son être, et qui finit toujours par suivre sa propre<br />

loi. Il n’en est pas un, parmi ceux que nous avons considérés, pas un qui n’ait<br />

voulu d’abord assurer son existence individuelle ; pas un qui n’ait considéré<br />

l’adjuvant de la <strong>pensée</strong> et de la forme françaises <strong>au</strong>trement que comm e un<br />

moyen dont il devait provisoirement se servir, pour devenir plus fortement<br />

lui-même ; pas un qui ne se soit soumis à une hégémonie intellectuelle,<br />

<strong>au</strong>trement que pour se libérer.<br />

Prenons l’exemple d’un de ceux dont l’unité se trouvait depuis longtemps<br />

acquise, l’Espagne. Pour la première fois dans l’histoire <strong>des</strong> temps modernes,<br />

celle-ci semble se franciser. Il lui f<strong>au</strong>t une académie, semblable à celle qui<br />

siège <strong>au</strong> Louvre ; et en effet, sous l’impulsion d’un homme qui est en relations<br />

directes avec les savants étrangers, le marquis de Villena, la Real Academia<br />

espanola se fonde en 1714, et commence un Dictionnaire dont le premier<br />

volume paraît en 1726. Il lui f<strong>au</strong>t un journal, sur le modèle du Journal <strong>des</strong><br />

Savants ; et en effet, le Diario de los Literatos de Espana paraît à partir de<br />

1737, plusieurs <strong>au</strong>tres le suivront. Il f<strong>au</strong>t qu’elle p.439 soumette son génie <strong>au</strong><br />

bon goût ; qu’elle ait enfin un théâtre classique, et de belles tragédies<br />

régulières qui obéissent <strong>au</strong>x trois unités. Il y a <strong>des</strong> Espagnols pour renier<br />

Calderon et Lope de Vega ; il y en a pour demander, et obtenir que les <strong>au</strong>tos<br />

sacramentales, un <strong>des</strong> trésors de leur héritage, soient exclus de toute<br />

représentation : ce qu’ordonne un décret royal en date du 11 juin 1765. <strong>Les</strong><br />

mo<strong>des</strong> sont françaises, portées avec ostentation par les femmes et même par<br />

les hommes, les petimetres ; la langue s’émaille d’expressions fran çaises ; les<br />

ministres <strong>au</strong> pouvoir sont imbus <strong>des</strong> idées françaises : triomphe <strong>des</strong><br />

afrancesados.<br />

Ou plutôt, vie superficielle et vie simpliste. Ces fragiles victoires <strong>des</strong><br />

gallomanes ne sont pas remportées sans de longues résistances ; encore<br />

n’ont -elles pas de lendemain. Aux éloges hyperboliques de Paris, répondent

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