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La pensée européenne au XVIIIe siècle - Les Classiques des ...

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P<strong>au</strong>l Hazard — <strong>La</strong> <strong>pensée</strong> <strong>européenne</strong> <strong>au</strong> <strong>XVIIIe</strong> <strong>siècle</strong> 232<br />

contenterait même plus de la formule relative de Leibniz : « Vous devez sentir<br />

que le Tout est bien de Pope n’est qu’une plaisanterie qu’il n’est pas bon de<br />

faire <strong>au</strong>x malheureux ; or, sur cent hommes, il y en a <strong>au</strong> moins<br />

quatre-vingt-dix qui sont à plaindre. Tout est bien n’est donc pas fait pour le<br />

genre humain... » (20 juin 1756.)<br />

Candide, ou l’optimisme. Traduit de l’allemand de M. le Docteur Ralph,<br />

avec les additions qu’on a trouvées dans la poche du docteur lorsqu’il mourut<br />

à Minden, l’an de grâce 1759. — C’est Job habillé à la moderne, dit Frédéric<br />

II ; le roman de Candide a rendu ridicule le système de l’optimisme, dit le<br />

cardinal de Bernis.<br />

Agilité et densité ; <strong>des</strong> observations justes, profon<strong>des</strong>, et p.315 qui frappent<br />

par la vérité de leur psychologie, faites d’un air si détaché et d’une manière si<br />

rapide qu’elles n’ont pas l’air de se prendre <strong>au</strong> sérieux ; un art unique<br />

d’indiquer sans dévelop per, d’évoquer les choses et de passer vite, comme un<br />

homme trop riche qui sème ses trésors sans prendre la peine de se retourner ;<br />

une profusion de traits, de flèches légères qui vibrent ; le jeu d’une<br />

intelligence implacable, d’ une ironie sans pitié ; tous les vieux procédés, les<br />

voyages, les utopies, les aventures dans l’ancien et dans le nouve<strong>au</strong> monde,<br />

les n<strong>au</strong>frages, les <strong>au</strong>todafés, les Eldorados, rajeunis et vivifiés par une<br />

étincelante fantaisie ; une sorte de fébrilité, due à la suppression de toutes les<br />

lourdeurs, de tous les intermédiaires inutiles ; une gesticulation de fantoches,<br />

une danse macabre de marionnettes comiques : c’est Candide. Et, recouverte<br />

par ces scintillements, une tristesse profonde. On est forcé de rire, devant tant<br />

de drôleries ; et ces drôleries accumulées aboutissent <strong>au</strong> désespoir. On est<br />

ébloui ; et puis on voit réapparaître le grand fleuve noir où s’engloutissent nos<br />

espoirs et nos illusions.<br />

P<strong>au</strong>vre Candide ! Plus misérable Cunégonde ! Ridicule Pangloss, qui<br />

contre vents et marées s’obstine à répéter que tout est bien, à proclamer qu’il<br />

n’est rien qui ne s’explique par le principe de la raison suffisante et par celui<br />

de l’harmonie préétablie : ni les maladies, ni les noya<strong>des</strong>, ni les incendies, ni<br />

les iniquités, ni les crimes ! Battu, pendu, brûlé, disséqué, tombé dans<br />

l’esclavage et ramant sur les galères <strong>des</strong> Turcs, il n’en reste pas moins de son<br />

premier sentiment : « Car enfin, lit-il, je suis philosophe, il ne me convient pas<br />

de me dédire, I.eibniz ne pouvant avoir tort. » Le spectacle qu’offre la terre<br />

est affreux : ce ne sont que guerres, massacres, oppressions, vols et viols ; et<br />

toujours il en fut ainsi dans le passé ; et toujours il en sera de même dans<br />

l’avenir, puisque les éperviers ont toujo urs mangé les pigeons quand ils en ont<br />

trouvé, et que pareillement ils les mangeront toujours. Mais tout est pour le<br />

mieux dans le meilleur <strong>des</strong> mon<strong>des</strong>.<br />

Par cette caricature l’optimisme est bafoué. « Qu’est -ce que l’optimisme ?<br />

disait Cacambo. — Hélas ! dit Candide, c’est la rage de soutenir que tout est<br />

bien quand tout est mal. » — « Il y a pourtant du bon, disait Candide. — Cela

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