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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

naissance reliés par le rythme, cette force suprême, que des peintres même doués peuvent ne<br />

jamais acquérir. Je ne sais plus qui a dit que le chef-d’œuvre est un projet de jeunesse réalisé<br />

dans l’âge mûr. Toujours est-il que nous retrouvons aujourd’hui ces mêmes signes, ces mêmes<br />

éléments transformés par la nature juvénile et ardentes de Lhote dans ses récentes toiles, où il<br />

touche à la maîtrise. La boucle est bouclée. Après avoir traversé mille expériences<br />

successives, après avoir subi l’examen le plus serré, les éléments « Lhotiens » prolifèrent<br />

luxueusement, parlant toujours un langage qu’ils ne doivent à personne mais sur un timbre<br />

élevé et sans réplique. L’homme est resté fidèle à lui-même à travers les inévitables mutations<br />

dictées par l’inquiétude, la sincérité et le désir de connaître toutes les techniques, car « il ne<br />

sert de rien d’ignorer quoi que ce soit de son art ».<br />

C’est vers 1910 qu’André Lhote découvre Cézanne. Découverte capitale, lourde de<br />

conséquence, évidemment. Auparavant, il a déjà fait une autre découverte : celle des fresques<br />

romanes de Saint-Savin. Première révélation pleine de répercussions et qui va, toute sa vie<br />

durant, servir d’élément régulateur à son œuvre. Ces fresques étaient absolument inconnues<br />

du grand public ; seul, jusqu’à ces dernières années, le très rare livre de Prosper Mérimée<br />

illustré de reproductions en couleurs en avait parlé. André Lhote le trouve chez un antiquaire.<br />

Hasard miraculeux, rencontre providentielle ? Le moyen-âge l’éblouit. Il essaie de dégager la<br />

leçon de cet art monumental, complet, riche et si humain. Des fresques de Saint-Savin, il<br />

ricoche sur les vitraux du XV e et du XVI e siècle des églises de Bordeaux : couleurs éclatantes<br />

et larges localisations. Il fait un pèlerinage à Saint-Savin ainsi qu’aux églises romanes de la<br />

région bordelaise et du Poitou, tout comme d’autres vont voir la Sixtine. « Et cela se vaut »,<br />

répète depuis, André Lhote.<br />

L’œuvre de Cézanne aussi vise à la monumentalité, mais à la monumentalité classique,<br />

à celle des musées. Son rêve n’était-il pas de refaire Poussin d’après nature ? Séduit par la<br />

grandeur de la charpente fortement géométrisée de Cézanne, Lhote abandonne un instant ses<br />

rythmes serpentins ou plutôt les incorpore en sourdine au rythme classique qu’il vient de<br />

découvrir, où domine la ligne droite, et dont il recherchera l’affirmation de plus en plus nette<br />

à travers Mantegna et Signorelli. En réduisant les fresques d’Orvieto à des schémas décoratifs,<br />

ce chercheur infatigable trouve tout naturellement, dans sa solitude bordelaise, son<br />

« cubisme ».<br />

On pouvait admirer à la rétrospective organisée par la galerie de France un paysage de<br />

1911 où l’essentiel du cubisme était déjà affirmé. Qu’est-ce que le cubisme, si ce n’est cette<br />

violente intrusion de la géométrie et d’une certaine mécanique expressive dans le monde<br />

encore tout idyllique et champêtre du tableau ? Baudelaire avait déjà parlé de la nature qui se<br />

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