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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

artisanales, vaisselle, tissus etc. ». Mais qui connaissait, en France, Malevitch ? On ne l’a<br />

ressorti qu’assez tardivement, au moment où l’anti-peinture cherchait ses ancêtres.<br />

L’engouement moutonnier, les gros intérêts mis en jeu, ainsi qu’un extraordinaire battage<br />

publicitaire ont fait le reste. A de rares exceptions près, Mathieu, Soulage, Hartung, le nombre<br />

des talents des abstraits d’après-guerre ne dépassait certainement pas le nombre de leurs aînés,<br />

alors que la masse se comptait par centaines, versait carrément dans le pompier, plus bête<br />

encore, parce qu’il ne nécessitait même pas d’apprentissage. Sur ce, je tirai ma révérence,<br />

révérence parler…<br />

Entre temps, O’Brady a disparu. Personne ne savait ni où il se trouvait, ni ce que faisait ce<br />

personnage fabuleux dont la calvitie intégrale légendaire a devancé, et de loin, que ce soit sur<br />

la scène ou sur les écrans celle de Yul Brynner. Or, voilà que j’apprends par Philippe Bouvard<br />

que O’Brady, parti avec Colette Brosset et Robert Dhéry jouer La plume de ma tante à New<br />

York, décida de rester en Amérique… en qualité de professeur à Princeton ! Non sans mal.<br />

Jugez-en. Pour régulariser sa situation « universitaire », il a dû, à l’âge de plus de soixante<br />

ans, passer sept examens. Brillamment, comme tout ce qu’il entreprenait. A la question posée<br />

par Bouvard s’il allait quand même revenir un jour à Paris, il a répondu qu’il n’en était pas<br />

question : « car, je ne vous le cacherai pas, il y a une substantielle retraite à la clef. J’en ai<br />

assez de me faire des cheveux pour mes vieux jours »… Cher O’Brady, bonjour ! Comment<br />

allez-vous ? Vous m’entendez ? J’aurais bien pris le Concorde pour vous serrer la main, s’il<br />

pouvait se poser à New York. Vous voyez, je ne vous oublie pas non plus…<br />

Ma première conférence du mois de Mai, Situation actuelle de la peinture a été reproduite un<br />

mois plus tard, in extenso dans le premier et le dernier numéro d’une publication plus<br />

éphémère encore que Bref, et qui s’appelait Renouveau Esthétique. Sa couverture s’ornait de<br />

deux dessins au trait côte à côte : l’un était une asymptote géométrique quelconque, tandis que<br />

l’autre figurait un mammouth préhistorique. Ceci, parce que leur rapprochement n’était<br />

nullement fortuit. Leurs courbes se répondaient étrangement. Rimaient, pour ainsi dire. Ni<br />

plus ni moins. J’y disais : La place d’un nouveau Cézanne est vacante, celui qui fera le<br />

chemin à rebours. Qui rassemblera les éléments disparates jusqu’à présent et leur donnera la<br />

vie. Qui fera la peinture stable et durable. Des réalisations, non pas des actes. Qui ne<br />

séparera plus, je le répète, les sentiments de la pensée et qui les réunisse en un grand tout.<br />

Les préhistoires se rencontrent. Celle de la nuit cède la place à celle du jour.<br />

Mon vocabulaire a peut-être changé depuis, mais qu’est-ce que je dis d’autre, en ce moment<br />

même ? Que ce que je ne cesse de dire depuis ce moment-là ?<br />

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