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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

Les vents bariolés planent au-dessus de la terre illuminée par les corps qui s’aiment.<br />

Silence de nuit au déclin, - silence découpé par les échos des tam-tams s’éloignant. La terre<br />

gémit ; elle s’étouffe dans les nuages de buée secoués par les rythmes convulsifs, elle<br />

chevauche dans son inquiétude les herbes et les tiges de plantes avec ses doigts électrisés, elle<br />

transpire les lumières migratrices de Saint-Elme et reste finalement immobilisée après la<br />

dernière décharge.<br />

La bacchanale nègre aussitôt terminée, les astres descendus pour un instant sur la terre<br />

remontent lourdement vers leur firmament.<br />

Encore un instant peut-être, et tout ce qui apparaissait miraculeux dans ce tableau, tout<br />

le sens incandescent des formes et des couleurs, tout leur sens dévoilé pour l’instant, – la<br />

révélation instantanée s’obscurcit, s’éloigne de nouveau ; – le fil extrêmement fin qui existait<br />

entre le spectateur et l’auteur, fil capillaire entre l’origine et la réalisation de l’œuvre d’art, se<br />

rompt et la figuration minima qu’il conserve s’atrophie, se cache entièrement devant les yeux<br />

non initiés, car ici il ne s’agit que d’un désaxement presque infinitésimal pour que le texte<br />

secret soit perdu pour jamais et que le tableau devienne abstrait sans réserves, c’est-à-dire non<br />

figuratif. Un jeu de matières, des techniques, des rythmes et des éclairages. Sans sujet.<br />

Et cette métamorphose, provenant d’un léger déplacement de la crémaillère de l’esprit,<br />

de l’apparition soudaine d’un autre foyer de la conscience, c’est le sort de la beauté furtive, de<br />

la beauté solitaire qui touche les zones oniriques de la beauté sans lecture immédiate et surtout<br />

irrationnelle, le sort de chaque beauté subtile qui n’est qu’un prétexte pour l’improvisation et<br />

la récréation de ses propres idées – la beauté, libre jeu d’imagination inguérissable, rêverie<br />

auréolée, réservés aux milliers d’explications, aux milliers d’éclairs…<br />

Pour commencer à parler de Vulliamy, il faut une fois de plus revenir à l’art nègre.<br />

L’époque cubiste, l’époque du laboratoire au sein de laquelle se cristallisait une<br />

nouvelle peinture murale, une autre conception de la peinture non figurative, - le temps orné<br />

de guitares disséquées, comme la vie décorée à l’excès et fictive, manifestait son premier<br />

amour pour l’art nègre. Amour parallèle à celui de Degas pour les estampes japonaises.<br />

Il s’agissait d’un écart vers le décor pur, composé d’éléments dissociés de la nature et<br />

la beauté intégrale et inimitable d’un masque nègre, sa pesanteur, sa construction et ses<br />

ornements deviennent l’alibi pour toutes les recherches.<br />

Autrefois, - la génération précédente avait cherché le mouvement, le raccourci et les<br />

coulisses déplacées des paysages stylisés de l’art japonais pour détruire l’homogénéité et<br />

l’immense vérité de la vision d’un Courbet, – maintenant se servant de l’art dit « sauvage » on<br />

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