anatole jakovsky (1907/1909 ? â 1983) - Bibliothèque Kandinsky
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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />
tout faire, ont trouvé ensuite plus facilement des interlocuteurs valables, prêts à discuter et à<br />
débattre loyalement les causes et les conséquences de ce litige toujours pendant ?<br />
Nenni… Pas plus d’effet que cette déclaration signée d’un nom, non moins illustre, celle du<br />
professeur Claude Lévi-Strauss, ethnologue de renommée mondiale et l’un des pèresfondateurs<br />
du Structuralisme, quand celui-ci répondant à une enquête sur Picasso, n’avait pas<br />
hésité d’abonder dans le même sens en écrivant textuellement ceci : « J’attendrai plus pour<br />
un renouveau des arts graphiques de ce qu’on appelle aujourd’hui la peinture naïve, que de<br />
toutes les recherches savantes des cubistes et des abstraits. »<br />
Et voila pourquoi votre fille est muette, et pourquoi ces naïfs, à peine sortis de leur ghetto,<br />
bien qu’accueillis chaleureusement par un public non prévenu, heureux de réentendre les<br />
battements du cœur humain dans la moindre touche de leurs toiles, ravi de revoir un autre bleu<br />
qui, cessant d’exister en tant que signe ou symbole, se muait désormais en un bleu on ne peut<br />
plus bleu du plus beau ciel d’été, quand on ouvre sa fenêtre dès potron-minet, ses sont heurtés<br />
aussitôt à une hostilité agissante de l’autre clan, se complaisant, le plus clair de son temps,<br />
dans le découpage de cheveux en quatre et les discussions byzantines sur le sexe des anges.<br />
Ainsi, admise de facto sur le tard, grâce à cette chère vieille Vox Populi ou le libre jeu de<br />
l’offre et de la demande, le seul à sanctionner, en fin de compte, les changements artistiques<br />
importants, la peinture naïve n’a pas été reconnue de jure pour autant. Situation paradoxale<br />
s’il en est, puisque, jouissant depuis ce temps-là d’une assez large légalité, elle est encore loin<br />
d’avoir acquis, hélas, trois fois hélas, cette franche légitimité, reconnue par Malraux, et<br />
notamment dans les Histoires de l’Art où on la passe couramment sous silence. Ceci malgré<br />
une cinquantaine de gros ouvrages parus déjà sur elle, et qui ne cessent de paraître, du reste, à<br />
une cadence accélérée. Peut-être précisément à cause d’eux. En grande partie. Parce que, la<br />
plupart d’entre eux, de bonne ou de mauvaise foi, n’importe, sont écrits par des gens<br />
insuffisamment renseignés, que rien ne prédisposait à cela, et qui, s’efforçant d’attraper en<br />
courant le dernier train en marche, ne font que ressasser une quantité de bourdes, d’erreurs, de<br />
préjugés, de confusions et d’idées reçues, accumulés depuis longtemps, très longtemps, du<br />
temps des lampes à huile et des cravates Lavllière, quand les gens bien ne savaient même pas<br />
ce que c’était.<br />
Tout se passe, par conséquent, comme si les unes et les autres, les pour et les contre, se<br />
refusant, par quelque complexe congénital, d’étudier les problèmes naïfs à fond, s’obstinaient<br />
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