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anatole jakovsky (1907/1909 ? – 1983) - Bibliothèque Kandinsky

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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />

Mais ici, je ne m’occuperai que de l’élément progressif qui mène l’histoire et à l’aide de<br />

quelques abstractions nécessaires tâcherai d’établir la ligne générale du développement de<br />

l’art dit moderne.<br />

Chaque société, chaque civilisation entre dans l’arène historique avec un inventaire très précis<br />

d’images symboles qui sont ses armes et qui doivent lui assurer sa domination croissante. Tel<br />

était le corps humain de la cité hellénique, telle était la perspective – l’idée de l’espace de<br />

l’homme, renaissant, tel était l’objet de la société actuelle, symbole de la possession privée.<br />

Chardin fut le premier à opposer l’égalité esthétique de l’objet humble aux accessoires des<br />

fêtes galantes. A opposer la grandeur inattendue et nouvelle d’une nature – morte à tout le<br />

luxe de derniers portraits de l’époque absolutiste.<br />

Presque toujours, la société déclinant vers sa fin, retrouve ce symbole l’interprétant comme un<br />

rêve pâle, exténué. Le hiératisme civique d’un David dégénère en mélodrame de Puvis de<br />

Chavannes, et le paysage classique perd sa fonction initiale et devient une espèce d’élégie –<br />

instantané d’impressionnistes. La paysage apparaît dans la peinture occidentale aussitôt après<br />

les grandes découvertes géographiques.<br />

L’idée de l’espace qui tourmentait l’homme renaissant, qui était obligé de la créer pour son<br />

expansion économique, devient bientôt un joli paysage – une belle vue pour les fils de ceux<br />

qui ont profité de tous les lingots d’or et de tous les fusils coloniaux. Et le vieux paysage se<br />

meurt au fur et à mesure du partage du globe terrestre. Avec la dernière terre inconnue et<br />

soumise, lui, le conducteur de cette idée de la conquête du monde, s’atrophie, s’anéantit, tout<br />

est vu. Tout est connu. Adieu. Et la dernière toile – le dernier reste du paysage, c’est le bleu<br />

de Picasso. L’air immobile, l’immense horizon devant la proue d’un bateau. C’est la peinture<br />

de nouveaux départs, teintée légèrement de l’amertume de la perte de l’inconnu. Un papier<br />

peint – la frontière de sommeils.<br />

Oui l’impressionnisme était le dernier style organique de l’ancienne peinture. Après,<br />

apparaissent deux grands phénomènes insolites, deux précurseurs de l’art d’aujourd’hui,<br />

Cézanne et Van Gogh, qui détruisent définitivement l’unité du contenu et de la forme d’une<br />

œuvre picturale. Inaugurant ainsi tous les nombreux ismes futurs qui se partageront<br />

également. La forme (Cézanne) se détache du contenu (Van Gogh), créant la première thèse et<br />

la première antithèse, qui vont actionner la dialectique du mouvement. Partant de ce carrefour<br />

d’ismes que l’on a vu s’allumer et s’éteindre ces dernières années, il n’y a qu’une seule route<br />

et elle est à sens unique.<br />

Naturellement ce n’est pas par hasard que Cézanne voulant recréer la stabilité, l’ancienne<br />

construction impeccable du tableau, attaque l’objet. Nature morte s’adapte mieux aux<br />

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