anatole jakovsky (1907/1909 ? â 1983) - Bibliothèque Kandinsky
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La trajectoire d’un critique d’art au XXe siècle.<br />
JAKOVSKY Anatole, La jeune peinture française contemporaine, cat.expo., Tours,<br />
Nouvelles Galeries, 9 - 17 mai 1947, Tours, La Vie des Arts éd., 1947, 11 p.<br />
Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la société est à reconstruire tant dans les faits<br />
que dans les idées. Anatole Jakovsky, grâce à cette préface à un catalogue d’exposition,<br />
appelle à un renouveau pictural : l’art abstrait ne peut en effet être poursuivi.<br />
Certes, il y a encore des gens à s'étonner qu'au sortir de ce long tunnel, de ces noires<br />
années, de ces années nues, trempées de boue, de larmes et de sang, la France et plus<br />
particulièrement Paris, n'ait pas donné une digne image de sa Délivrance. Quelque chose de<br />
grandiose sans doute, comme cette fameuse Liberté – sein nu et drapeau tricolore – sur la<br />
barricade de Delacroix.<br />
Ils y voient un signe infaillible de sa décadence artistique actuelle. Il n'y a plus de renouveau,<br />
disent-ils chagrins ; même pas un nouvel « Isme ». Au fait que fait donc sa jeunesse?<br />
Ah ! que ne sont-ils allés visiter quelques expositions surgies, tel un feu d'artifice, au<br />
lendemain de la Libération ! Ils auraient constaté justement que toute une nouvelle équipe de<br />
jeunes talents s'est imposée aussitôt à l'attention du public.<br />
Elle s'est imposée surtout par son dynamisme : par la belle violence du rythme, par la couleur<br />
pure et saine qui clamait sa joie de vivre, par l'incandescence des formes, par la lumière très<br />
intense qui jaillissait de toutes parts.<br />
Tous, ils chantaient l'espérance, et cela même pendant l'occupation, malgré les multiples<br />
verboten de la presse nazifiée, prêchant, comme partout ailleurs, le retour aux traditions<br />
périmées. Évidemment, car s'inspirant de leurs aînés, de Picasso ou de Matisse, les<br />
prolongeant chacun à sa façon, ce sont eux, ces quelques jeunes peintres jusqu'alors inconnus,<br />
qui ont continué ainsi la tradition et par-là même la France. La tradition vivante et non la<br />
lettre morte.<br />
Qu'importe s'ils s'éloignaient parfois de la réalité, entraînés comme malgré eux, et par la ligne<br />
mélodieuse, et par le contraste de plus en plus puissant des couleurs ? Qu'importe s'ils<br />
s'occupaient davantage de la forme du tableau que de son contenu, s'ils étudiaient plus<br />
attentivement les moyens d'expression que ce qui est à exprimer ?<br />
Qu'importe, vraiment, puisque c'est le destin de l'homme et du monde qui le voulait ainsi. Il y<br />
avait donc des raisons pour cela.<br />
Au temps de Delacroix, on pouvait bien échanger quelques balles dans la rue et renverser un<br />
régime, la réalité ne changeait guère pour cela. Tout juste si l'on remplaçait sur un guéridon<br />
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